Œnotourisme durable : une tendance à suivre !

L’Œnotourisme bio ou vertueux est en cours de gestation !
Pierre Rahbi* a beaucoup participé à la maturation des idées en proposant une éthique de vie. Il suggère un modèle agricole axé autour de l’agriculture paysanne.
Le CIRAD travaille sur le concept d’Agriculture Ecologiquement Intensive : penser le progrès agronomique.
Le croisement de ces deux courants nourrit la problématique de l’homme et de son agriculture, du vin et de son tourisme !

Un mot encore peu connu de tous : l’agro-écologie, désigne une nouvelle science qui est «une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités des écosystèmes en visant une mobilisation optimale des mécanismes de régulation naturels, la valorisation de la diversité, le recours à l’autonomie…» selon le rapport EPICES & BLEZAT**

L’écocitoyenneté «est la conscience écologique d’appartenir à un environnement qui garantit son existence, ce qui implique pour lui des droits et des devoirs par rapport à un territoire».

Cela influe sur la vie de tous, dans nos choix quotidiens, dans nos actes d’achats, dans notre façon de voyager également ! Ce concept est devenu une réalité est dirige maintenant nos pas d’œnophiles aventuriers.

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A moyen terme l’agro-écologie est l’enjeu de l’œnotourisme !

Selon Global Footprint Network, la France le 5 mai 2018 a consommé tout son potentiel de matière première pour l’année : à ce rythme il nous faudrait trois planètes pour subvenir à nos besoins !

Les valeurs d’éthiques prennent de plus en plus de place dans nos sociétés mondialisées et hyper-informées. Des scandales déjà anciens avaient jeté l’alerte sur une opinion toujours plus sensible à la problématique environnementale.

Ces électrochocs ont permis une prise de conscience massive de la filière vin avec par exemple la mise en place d’un plan climat 2020 et un projet d’amélioration des pratiques vertueuses sur l’ensemble du vignoble Girondin par l’établissement du SME (Système de Management Environnemental) qui représente 800 professionnels soit 20 000ha en 2018.

Le réchauffement climatique avec ses perturbations régulières de coups de chaud ou de pluies titanesques, nous maintient dans l’idée qu’il faut agir… que la connaissance d’un phénomène ne suffit plus, sa conscientisation passe par des actes sous forme d’engagement sociétal. C’est à ce niveau que le vigneron doit agir, en dehors de son mode de production … par un storytelling adapté par exemple.

La mise en place de services écologiquement vertueux devrait suivre la production de denrées et de vin en particulier, qui a vu la proportion de bio croître considérablement. Comme en suivant des règles plus économes pour la planète, moins utilisatrice d’énergies fossiles et mieux intégrées dans sa vie quotidienne.

Ainsi le visiteur pourrait intégrer dans ses critères de choix, des valeurs environnementales telles qu’un bâtiment à énergie positive, la gestion de l’eau, la préservation de la biodiversité. Ces éléments fonctionnent autant pour le choix d’une chambre d’hôtes ou la visite d’une cave.

La conjonction de prise de conscience de la filière vin et des consommateurs en général va obliger la filière tourisme à s’adapter. Par sa plasticité qui la caractérise, celle-ci devrait assez facilement trouver des solutions techniques et marketing pour rencontrer son marché.

L’humain est au centre

L’œnotouriste est aussi un consommateur. L’humain reste toujours au centre des préoccupations ! Ainsi, ses motivations légitimes, initialement centrées sur soi, se partagent dans une communion spirituelle et mondiale du respect du bien collectif que sont les espèces menacées, la raréfaction de l’eau, les micro-plastiques, les micro-particules …

On retrouve aussi l’expression du Consom’acteur avec le Commerce Responsable, ainsi fairbooking.com « propose une alternative aux centrales de réservation en ligne … de rétablir un contact direct et humain entre hébergeurs et clients. L’objectif est de préserver l’emploi et l’investissement des établissements … » On voit bien la passerelle entre le respect de la nature et de l’humain !

Wolkswagen et son « dieselgate » ou la question des produits phytosanitaires agitent notre conscience écocitoyenne.

Notre « Jiminy Criquet » écologique nous fait sans cesse revenir au sentiment de culpabilité de consommateur / destructeur qui compose l’ambiance postmoderne dans laquelle nous vivons.

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Avec l’agritourisme, en observant une vision holistique, l’ensemble de ce qui constitue notre Etre est concerné par la problématique agro-environnementale. Cela devrait devenir l’argument commercial phare pour les décennies à venir ; les metteurs en marché doivent rapidement intégrer cette approche vertueuse pour rester attractif.

Le Languedoc est en point sur ce sujet et la CIVL a mis au point un projet d’observatoire du Développement Durable … excellente initiative à suivre de près !

Ainsi les Vignerons de Buzet qui cultivent 500ha de vigne en HVE niveau 2, proposent une visite sur le thème du développement durable avec la découverte du jardin des filtres.

« Cela permet d’avoir un discours neuf et surtout moins technique pour capter une nouvelle clientèle plus jeune plus urbaine, plus sensible à l’écologie » dit Stéphanie Caldo.

Le mythe Virgilien de l’antique Arcadie nous hante … pour tous les œnotouristes urbains que nous sommes … la préservation du rêve vaut bien un effort bio-sociétal !

Le Bio versus la HVE ?

On consomme bio pour sa propre santé ou pour encourager un vigneron, par idéal ou par mimétisme, pour faire valoir ses valeurs ou par quête du goût authentique.

Quelques soient les raisons, cela a un impact considérable sur la filière vin. En 2016, 9% du vignoble était en bio, 15% en conversion et cela reste une tendance croissante.

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La certification HVE a été créée lors du Grenelle de l’environnement, en 2007 puis relancée avec la CNCE (Commission Nationale de la Certification Environnementale) en 2011.

La certification HVE concerne l’entreprise et non pas la parcelle. On travaille avec des indicateurs phytosanitaires qui aident à réfléchir à comment sortir de la dépendance, avec des solutions adaptées (contrôles IFT Indice de Fréquence de Traitements) à chaque problématique terroir.

  • Le bio parle du produit : ce qui se passe au champ
  • Le HVE parle de l’entreprise : ce qui se passe autour du champ

A l’inverse du cahier des charges inflexible du bio, le HVE répond à la question « ce que je fais pour aboutir à un respect environnemental en travaillant sur les interactions qui favorisent la production ? » explique Laurent Brault***. En replantant des haies, des arbres, en réinstallant des ruisseaux.

« Pour garder les chauves-souris il faut des arbres non-taillés qui les hébergeront dans les bois mort …celles-ci peuvent manger 2 à 3000 vers de la grappe, un nuisible qui cause des pertes importantes dans les parcelles » dit-il : un bel exemple de l’utilisation de la chauve-souris en Dordogne.

Il y a 30 indicateurs de performance comme par exemple le rapport surface cultivée surface « naturelle » ou en repos permettent de réaliser l’audit HVE.

Deux fonctionnements différents : Alors que la logique Bio concerne le vigneron dans sa démarche de production qui doit suivre le cahier des charges, la certification HVE est plus collective et concerne le groupe (à l’échelle de l’entreprise mais aussi des regroupement de professionnels) où le volontariat, l’exemple, le partage d’expérience et l’émulation sont portées par des méthodes originales de mentoring****

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La certification HVE fonctionne sur trois niveaux :

  1. « Le 1er niveau d’exigence environnementale correspond au respect des bonnes conditions agricoles et environnementales.
  1. La certification de 2ème niveau, ou « certification environnementale de l’exploitation », atteste du respect par l’ensemble de l’exploitation agricole, des exigences environnementales, c’est une obligation de moyens.
  1. La certification de 3ème niveau atteste du respect, pour l’ensemble de l’exploitation agricole, des seuils de performance environnementale portant sur la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et de la ressource en eau, c’est une obligation de résultats. »

Il y a 30000 exploitations (tous types d’agriculture) en bio en France pour 1000 en HVE. Alors que le bio est sur toutes les lèvres, la certification est à peine connue du grand public, mais elle a un réel intérêt en b2b où les grands groupes de distribution (Système U avec le label Vigneron Développement Durable, l’attitude pro-active d’Intermarché …) sous la pression du marché, demandent plus de garanties agro-environnementales.

L’Union Européenne pousse les chercheurs à trouver des solutions doublement rentables : pour les écosystèmes mais aussi en terme de ressources économiques pour les vignerons comme le prouve les recherches de Bioviti en Espagne qui «utilizar la biodiversidad como herramienta de competitividad para los viticultores»

A la croisée de deux filières en pleine structuration

L’œnotourisme n’a pas encore 20 ans, cette forme de tourisme encore en cours de définition évolue dans un contexte de mutation généralisée. La révolution digitale transforme la manière de concevoir et d’organiser ce nouveau métier.

Les valeurs d’éthiques environnementales vont agir également sur l’œnotourisme. La manière de produire le vin mais aussi l’intégration de la cave dans son territoire, la gestion de l’humain en interne et en externe vont progressivement entrer en ligne de compte dans le choix du Prosumer*****.

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Global Vini Service avec ses bouteilles en lin ou les flacons en canne à sucre de Nicolas Moufflet, le packaging durable propose de nouvelles solutions. D’ici peu, un produit écologique complet (dedans & dehors) va concurrencer l’offre traditionnelle … mais des progrès restent à faire dans la dimension logistique

La RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) est « un concept qui désigne l’intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités économiques et à leurs relations avec les parties prenantes que sont les salariés, les actionnaires, les fournisseurs, les sous-traitants, les consommateurs… »

Plus large que la simple fonction productive, cette réflexion durable pense l’humain au travers des fonctions sociales, économiques et environnementales en proposant une organisation vivable pour les habitants du territoire, viable en matière entrepreneuriale et équitable pour les employés.

Là aussi, il est fort à parier, que l’engagement durable d’une entreprise œnotouristique, sera un argument majeur pour conquérir le consommateur, qui de moins en moins, aura envie de cautionner des prestataires peu respectueux de ces valeurs.

Le cas des saturations de Venise et Barcelone sont bien connus. La Percée du Vin Jaune, dans le Jura, a été obligée de revoir son organisation afin de contrôler les effet de son succès démesuré avec 60 000 visiteurs en 2016. En se recentrant sur la qualité et en cherchant à préserver ce qu’ils sont, ils ont fixé le quota à 25 000 personnes inscrites sur réservation.

Vers un Œnotourisme Durable ?

Prenons exemple avec Serge Martin-Pierrat qui est un précurseur et membre actif au réseau FARRE (Forum des Agriculteurs Responsables Respectueux de l’Environnement). Il a construit sa cave aux normes HQE semi-enterrée et centrée sur une cours intérieure, ce qui économise la lumière électrique. Bâtie en pierre du Gard qui a un fort pouvoir d’inertie, la température est régulée par un puits canadien, les murs végétalisés apportent une isolation thermique, indispensable dans l’Hérault aux étés torrides …

Côté tourisme, il existe ATR Tourisme Durable : une association qui fédère les professionnels du voyage engagés dans le développement durable et fait la promotion du tourisme responsable auprès des voyageurs. Il s’agit un label qui garantit le respect des engagements du tourisme responsable.

Une charte du voyageur a été rédigée qui demande de se « mettre au diapason des us et coutumes de la destination, sans imposer ses habitudes ni son style de vie ».

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Une agence de voyages Québécoise Passion Terre créé des expériences de tourisme durable en « priorisant des services éco-responsables en matière de transport, d’hébergement et des attraits touristiques » et « en valorisent la découverte, la connaissance et l’apprentissage du savoir-faire local afin de préserver et valoriser un environnement naturel et humain ».

Lentement mais sûrement !

Cette tendance de fond progresse lentement pour entrer dans un marché qui n’a pas encore trouvé des volumes significatifs mais qui sont renforcés par le mouvement Slow. La clientèle Slow cherche à privilégier la qualité de l’expérience par des rencontres personnalisées, des échanges Culturels, des apprentissages en immersion plutôt que de procéder à l’accumulation de visite en un temps record.

Ainsi on parle du retour du voyageur, qui consommerait moins compulsivement : une Itinérance douce qui permet de s’intégrer à la vie locale, en vivant le pays, en goûtant le paysage : toute une problématique qui nous relie à l’œnotourisme & à l’agritourisme.

Babel Voyages, Terra Mundi  ou Kookooning.com sont des exemples d’agences de voyages qui se sont résolument orientées vers le slow tourisme. Ainsi selon Atout France, 53% des français disent qu’ils veulent prendre leur temps quand ils voyagent et selon l’OMT le tourisme vert est en croissante de 10 à 20%.

Et le digital dans tout ça ?

Le digital est l’ami de l’écocitoyen : une simple appli évite l’impression de brochures et de plans parfois inutiles. Pratique et rapide, cela n’empêche pas la découverte Slow du terroir et même permet d’approfondir la connexion avec l’œnodestination, comme par exemple la réalisation d’Anne & François Collard du Château Mourgues du Grès d’un parcours sensoriel de découverte du paysage et du territoire accessible via une appli embarquée.

Explorama anciennement Biodiv Go, une Start Up spécialisée dans la valorisation des écosystèmes, permet de mettre en évidence les particularités d’un terroir mais surtout d’éclairer le visiteur sur tous les efforts réalisés par le vigneron pour préserver la biodiversité, sa manière d’utiliser les ressources naturelles pour lutter contre les maladies ou les prédateurs de la vigne…

C’est raconter le micro-cosmos du cep pour insérer le vignoble dans une réalité qui est plus que virtuelle et fait un storytelling post moderne adapté au rythme du visiteur.

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Une autre Start Up, Elexi, créée en septembre 2017 et installée à Bordeaux, entend fournir des prestations de taxi / chauffeur avec des véhicules électriques.

Précurseur dans en la matière, le jeune patron Alexandre Aubertin se différencie de Uber par son approche très RSE en pratiquant une politique salariale responsable, un proposant un projet économiquement rentable et en ne polluant pas !

Un éco-wine tour existe déjà en ne visitant que les vignerons et autres prestataires qui ont de bonnes pratiques environnementales … par exemple, ils s’arrêtent au château la Dauphine à Fronsac « Best of wine » pour les valeurs environnementales.

La technique va toujours plus vite que l’humain

Comme pour le digital c’est l’usage qui est plus long à mettre en place que l’outil lui-même !

Les entreprises œnotouristiques mettent du temps à intégrer toute l’organisation de l’accueil digital en partant de l’expérience client off & on line à la gestion des datas et le management propre de l’accueil physique (les hôtes, les résa, le suivi des commandes, la compta, le community management …).

Il en va de même pour cette transformation de l’œnotourisme qui s’oriente vers une logique responsable et durable. Produire du vin vertueux n’est que la partie émergente de l’iceberg.

Pour reprendre ce que disait Laurent Brault « l’agro-écologie est une agronomie alternative, le Bio, la Biodynamie, la certification HVE sont finalement des manières différentes pour aller vers un même but : une viticulture respectueuse de l’environnement ».

Une offre œnotourisme durable est beaucoup plus que de laisser voir un cheval en labour, une image d’épinal qui peut ressembler à du «Greenwashing».

Il s’agit de penser l’organisation de l’entreprise avec des fournisseurs vertueux, des systèmes de transport moins polluants, une gestion sociale respectueuse … ainsi qu’un partenariat avec d’autres prestataires œnotouristiques du même acabit !

Comme le disait Matthieu Rozel en parlant de la certification HVE «cela valorise le travail de fond de l’agriculteur c’est-à-dire être en osmose avec cette philosophie»

Cette tendance paraît ne plus en devenir une, mais un mouvement de fond !

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Ainsi il y a à Saint Emilion, la volonté d’intégrer l’obligation d’une certification (HVE, Bio, SME…) quelle qu’elle soit va transformer le cahier des charges et donne autorité à l’ODG (Organisme de Défense et de Gestion) pour faire appliquer ces nouvelles réglementations environnementales … nul doute que cette initiative est un élément annonciateur d’un changement global à l’échelle de l’INAO  (Institut National des Appellations d’Origine).

Idem dans l’appellation Faugères où le cahier des charges a été modifié dès 2011 pour limiter le désherbage chimique et la fertilisation azotée dans le cahier des charges. Nathalie Caumette précise que leur « force est que le cahier des charges s’impose à tous, qu’il n’y a pas de choix. Cela donne à l’AOC une valeur d’outil qui permet d’évoluer sur un territoire entier et non pas sur quelques parcelles ou un produit en particulier« .

Cela a créé une vraie dynamique collective avec un taux de vignerons en bio qui est quatre fois supérieur à la moyenne nationale.

L’ODG du Cognac a inscrit deux mesures agro-environnementales à son cahier des charges en 13 juillet 2018 qui interdisent « le désherbage chimique des tournières et le désherbage chimique total des parcelles de vignes. Sous tous les interrangs, la maîtrise de la végétation étant alors assurée par des moyens mécaniques. »

Ces changements commencés fin 2016, vont permettre la mise en place d’un référentiel collectif « Viticulture Durable Cognac » d’ici 2021 avec pour objectif 100 % de participation pour aboutir à une « Certification Environnementale Cognac ».

La Champagne est active également. Cette région viticole a mis en place Viticulture Durable en Champagne (VDC), une certification reconnue par le ministère de l’Agriculture qui oriente sa démarche sur trois axes :

  • Empreinte Biodiversité
  • Empreinte Carbone
  • Empreinte Eau

Quand les motivations individuelles rejoignent l’intérêt collectif … cela ressemble étrangement aux problématiques œnotouristiques : afficher ses vertus écologiques c’est devenir plus visible et affirmer des valeurs motivantes pour les visiteurs.

C’est un peu ce qu’a affirmé en gros la 3ème conférence mondiale de l’œnotourisme de l’OMT (6 & 7 septembre 2018 en République Moldave) qui montre le rôle clé de l’œnotourisme dans le Développement Rural.

Je conclurai en reprenant les mots de Matthieu Rozel : «C’est la somme de petits détails qui font les vins, c’est aussi le cas du tourisme». Evident ! Non ?

*Pierre Rabhi : Auteur du célèbre « Vers la sobriété heureuse » Editions Actes Sud

**RAPPORT EPICES & BLEZAT, EN COLLABORATION AVEC ASCA – MAI 18 : MOBILISATION DES FILIERES AGRICOLES EN FAVEUR DE LA TRANSITION AGRO-ECOLOGIQUE ETAT DES LIEUX ET PERSPECTIVES

***Laurent Brault : responsable de la problématique Bio & HVE chez Vigneron Indépendant de France

**** Mentoring : formation par les pairs

***** Prosumer : contraction de producer / professional et consumer donne Prosommateur en français

10 secrets pour être un bon manager œnotouristique

Piloter une entreprise œnotouristique n’est pas tout à fait la même chose que de conduire un vignoble ou  un hôtel. L’entrepreneur doit suivre quelques règles pour que l’entreprise œnotouristique réussisse !

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1 Etre un manager bienveillant

La bienveillance semble logique avec les visiteurs, mais ça l’est encore plus avec les salariés, surtout s’ils sont en contact direct avec le client. La mauvaise humeur, l’irritation, le stress se communique aisément, il s’agit de ne pas contaminer l’entourage avec des fonctionnements qui font décroître l’efficacité de l’équipe d’accueil.

2 Etre maître de la situation

L’autorité naturelle vient de la compétence, le patron doit convaincre sans devoir élever la voix ou répéter. Ainsi, il doit être capable de faire une « résa », d’animer une dégustation, s’occuper d’une commande, construire un programme de visite … comme tout employé de l’entreprise. Il ancrera encore plus la relation avec son équipe, montrera sa valeur … et pourra remplacer au pied levé celui qui tombe malade au plus fort de la saison !

3 Etre professionnel

En matière œnotouristique, être professionnel signifie être à l’aise sur TripAdvisor ou avec une agence réceptive locale, de la même manière qu’avec un œnologue conseil ou un sommelier. Connaître les contraintes du secteur touristique et aussi important que d’apprécier la demande d’un œnophile, de converser en anglais que de déguster !

4 Utiliser l’oralité

Le cœur & le cerveau ? c’est une très vieille histoire ! L’un ne va pas sans l’autre … aussi, être à l’aise à l’écrit n’est plus suffisant. On n’envoie pas un mail à son responsable d’accueil pour s’assurer de l’agenda de la semaine … Les intonations, les mouvements, le regard véhiculent beaucoup d’informations qui sont qualitatives (rassurantes, encourageantes, plaisantes, sérieuses, interrogatives …). Ce n’est pas pour rien de les émoticônes sont nés avec les textos !

5 Echanger avec les partenaires

A l’heure de la digitalisation de l’œnotourisme il n’est plus possible de travailler solo. Des pure-players à la Communauté de Communes, tout le monde est connecté. La communauté de followers aime la marque de l’entreprise et apprécie ses prestations/produits. Partager n’est plus seulement indispensable sur les réseaux, ça l’est aussi avec les professionnels de l’œno-système et surtout avec les personnes qui travaillent dans l’entreprise.

6 Faire confiance

Pas d’esprit d’équipe sans confiance ! La responsabilisation des employés découle de la liberté laissée par le manager, par son style de gestion humaine, par l’entrepreneurship … par sa vision ! La confiance est au centre du travail. Elle existe aussi dans la relation client, où les valeurs d’authenticité prennent de plus en plus d’importance depuis que le digital s’impose.

7 Aimer les gens

Le vin est la boisson du partage, déguster est un acte Culturel. Voyager c’est la rencontre … Il n’est pas imaginable qu’une entreprise œnotouristique n’intègre pas les valeurs humaines dans la pratique de son métier. Comme l’exemple vient « d’en haut », il est important que le « boss » soit près des gens, participatif et tolérant. Le mot touriste est devenu un gros mot : traitons le comme un individu !

8 Fixer des objectifs co-décidés

En mettant les collaborateurs au centre de la réflexion de l’entreprise, le patron emporte l’adhésion de l’équipe en montrant sa confiance et en responsabilisant les acteurs de l’œnotourisme. Les deux parties se comprendront mutuellement et pourront appréhender à leur juste valeur, la complexité des tâches à mener pour atteindre les objectifs.

9 Réfléchir à ce que l’on apporte à l’entreprise

Ce n’est pas par ce que l’on est patron que l’on a rien à donner. Le leader dépend de son contexte. Chacun a ses qualités propres, mais ce dernier doit pouvoir sentir ce dont les employés nécessitent. Outre l’aspect fonctionnel et technique, le patron doit être capable d’apporter un engagement, une vision et une culture d’entreprise.

10 Regarder autour de soi

On parle de « benchmarking » qui est aussi une autre manière de nommer les études de concurrence. Mais il peut aussi s’agir de se mettre dans la peau des employés & partenaires, et mieux encore dans celle des clients. L’empathie est indispensable pour réussir dans les métiers de l’accueil. S’inspirer des réussites et des erreurs des autres, écouter les retours clients, veiller à l’e-réputation sont autant de moyens d’être en veille.

 

Conseil Œnotourisme propose des formations et des séances de coaching aux entrepreneurs du tourisme viticole. Il est parfois utile de disposer d’un regard extérieur et d’une expertise pour piloter le changement et installer les fondations d’une mutation économique et stratégique durable.

L’œnotourisme est une activité Culturelle – 2ème partie

7  L’œnotourisme n’est pas une activité touristique comme les autres…

De fait, parce qu’il s’agit d’une activité culturelle, avec ses nuances, ses chapelles, ses niveaux de connaissance … il faut distinguer des variations dans les demandes touristiques. Un winelover de Chicago n’est pas un œnophile de Bruxelles.

Comme il a été dit dans la 1ere partie de cet article, l’échelle de valeur de l’engagement bachique, comme élément identitaire très structurant, peut revêtir de nombreuses interprétations tant pour le consommateur que pour les producteurs.

Cela implique une orientation marketing où il faudra prendre en compte le croisement entre l’offre œno-culturelle plus ou moins standardisée et la demande dans sa culture d’usage (selon les habitudes du client).

Rapporté à un échelon international l’offre oenotouristique Ligérienne, Dalmate ou Californienne seront mises en concurrence face à des œno-curieux provenant de Taïwan, Londres ou Vancouver, on observe aisément la complexité des croisements culturels qui peuvent résulter lors de l’expérience client.

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Plus que jamais, d’un point de vue client, la partie subjective prend une part importante, ce qui signifie que la perception des dimensions culturelles d’une œno-destination arbitrera ses choix.

Une fois ce point corrélé avec la puissance de l’outil digital, les adaptations stratégiques devront sans cesse être combinées aux standards qualitatifs tout en mettant en exergue la particularité de l’offre.

La part patrimoniale du vin, donc sa dimension « spirituelle », constitue le point central du choix initial.

8 Quelle définition pour la Culture ?

De quelle Culture parle t-on ? Celle du vieil Européen face à celle du Nouveau Monde, celle urbaine d’un visiteur de Shanghai face à celle d’un villageois bourguignon ? Celle d’un chef étoilé face à celle d’un buveur de soda ?

Au-delà du produit vin, la Culture c’est aussi la façon d’appréhender notre monde : les coutumes régionales, l’écologie, le vivre ensemble …

Au travers de la dimension « terroir », les choix agrologiques du vigneron ont aussi une valeur culturelle : travailler les vignes en conventionnel, en agriculture raisonnée, en agriculture biologique ou biodynamique ne signifie pas la même chose.

Ainsi on en vient à parler d’engagement local qui peut avoir une résonance globale : la pratique des voyages et des réseaux sociaux permettent à ces problématiques de traverser les frontières. Certains pays ou territoires (on peut les considérer comme des destinations) deviennent leaders et des exemples en ces matières : les visiteurs souvent reflètent l’opinion moyenne de leur pays d’origine et par exemple les promesses des Américains ou des Chinois lors de la COP21 peuvent illustrer l’état d’esprit des touristes venant des ces pays.

En matière de Développement Durable, la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), comprenant le consommateur, les conditions de travail, l’environnement, la loyauté des pratiques, la gouvernance régionale et privée, les droits de l’homme  … entre dans cette conception large du point de vue Culturel d’une œnodestination.

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L’exemple, conté par le biologiste George Oxley, du RoundUp utilisé comme désherbant qui n’est possible que s’il existe des plantes génétiquement modifiées, est caractéristique d’une culture de la surproduction et de la surconsommation.

Le discours sur la préservation de la biodiversité, laissant la vie à la multitude de plantes (mais qu’est-ce qu’une mauvaise herbe ?) qui joue l’indispensable rôle de garantir l’équilibre des sols (Ph, vie bactérienne et fongique, insectes et micro-organismes …) concerne aussi bien celui du terroir viticole (support des vins qui ont une identité) que du terroir humain (choix de vie).

La mondialisation de la production viticole (de nombreux visiteurs internationaux considèrent le vin comme étant issu d’un process plutôt industriel qu’artisanal !) rentre donc en opposition avec la spécificité du terroir et son caractère unique.

9 Vers un idéal type de la consommation Culturelle oenotouristique ?

Ainsi, l’universel de l’imaginaire du vin rencontre celui de la globalisation et la PRATIQUE DU VIN qui suppose la beauté des paysage, le partage amical, la parole facilitée, l’harmonie relationnelle, un certain contact avec la nature, l’hédonisme …

La PRATIQUE CULTURELLE des individus (avec leur histoire propre, leur environnement, leur idéologie) peut venir bouleverser la sereine tradition du bien vivre local : aller à la rencontre d’un pays, d’un terroir est aussi un choc des Cultures et peut parfois révéler des situations cocasses ou incongrues.

Le rêve d’un voyage viticole contient donc les mythes fondateurs, l’idéal Virgilien, le mimétisme des classes dominantes … et cela fonctionne comme une trame qui constitue le désir intime des œnotouristes mais qui n’est pas toujours explicité. C’est aussi le cœur de la promesse agritouristique.

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Certes, il vaut mieux montrer un vigneron en cotte dans une cave voûtée dénichant un flacon à l’étiquette mangée par l’humidité qu’un hôte aux gestes standardisés dans un lieu anonyme tenant une bouteille au design marketé : ce fantasme reste une vérité !

Nous sommes dans la caricature … mais le succès de l’accueil dépend grandement du désir du client et de la subtile combinaison du talent de l’équipe réceptive.

Le rêve d’une terre promise où coulent à flot lait, vin et miel se retrouve dans le projet d’œnotourisme, on pourrait y voir là la raison pour laquelle le taux de fréquentation s’accroît singulièrement à la période des vendanges.

10 A la croisée des Cultures

Mais si le visiteur a choisi une certaine œno-destination, ce n’est pas tant pour ses vins que l’offre globale qu’elle propose. En matière d’œno-destination, la concurrence entre Pinot ou Cabernet-Sauvignon pourrait se concevoir ainsi : Oregon versus Bourgogne, Napa Valley versus le Médoc …

Pour un amateur Australien ou Chinois, quels seront les éléments décisifs qui feront pencher la balance favorablement vers la destination France ou la destination USA ?

Ainsi les prestataires doivent être capables, sans dénaturer la qualité du service, de comprendre l’attente de quête de Mythe : il faut pouvoir intégrer cette donnée de nature quasi indicible afin de mettre à disposition du visiteur une opportunité expérientielle de niveau très qualitatif.

On pourrait résumer en affirmant qu’en France (et en Europe), la consommation de vin est liée à des dimensions hédonistes qui incluent l’histoire, les paysages, la gastronomie et le partage. C’est un usage qui a de la profondeur, de la densité, de l’identité.

A l’inverse, le nouveau monde consomme le vin comme un alcool. La Culture du vin progresse mais le chemin est long pour voir se généraliser une approche « traditionnelle». Le plaisir de consommer est immédiat, sans mettre le vin en perspective avec un quelconque patrimoine en général. C’est pratiquement plus un élément de distinction sociale et d’affirmation d’un certain niveau de développement culturel (lié à un sentiment de sophistication).

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Ainsi sur Instagram, il est fréquent de trouver des posts où un grand vin est accompagné d’une … pizza : cela témoigne d’une confusion des genres, d’un réel plaisir du vin et de la bonne chaire (une bonne pizza c’est quand même excellent !) confronté à une impéritie gastronomique.

Les vignerons français ont du mal à s’adapter à cette approche « sans âme », purement consommatrice, sans lien avec un certain héritage ou une manière « d’être en vin ».

C’est aussi ce qui attire les authentiques winelovers du nouveau monde, c’est ce qui fait la différence positive de nos vins de terroir de ceux du nouveau monde. Par l’approche Terroir et avec ce supplément d’âme qui fait que nos vins sont un peu plus que simplement bons, les œnotouristes accèdent au rêve : un plaisir autre que gustatif.

En suivant la démonstration de Natacha Polony ** « l’alimentation (et donc le vin) s’ouvre sur des questions politiques, pour des raisons de contrôle social et consummériste, le sucré est mis en avant … » l’on comprend que les pratiques alimentaires & la valeurs des saveurs sont des marqueurs culturels manifestes !

11 La conformité de l’offre

Voyager suppose une rencontre entre au moins deux origines, deux cultures, deux « arts de vivre » : celui de l’hôte et celui du visiteur. L’accueil au sens large sous entend un certain sens de l’empathie, de la connaissance minimale de la Culture des visiteurs, de disponibilité, de professionnalisme.

Les rythmes de vie (heure des repas), les arts culinaires (association mets & vins, menu 3 plats …), la manière de consommer le vin (sentir, goûter, tenir son verre … ) changent d’un continent à un autre (rapidité de service, rythme de vie…).

Comprendre la Culture de l’autre c’est commencer à s’adapter au client, cela participe à la qualité de la prestation, donc de l’expérience client.

Le prestataire œnotouristique dans la même logique ne peut ignorer les pratiques quotidiennes d’un voyageur (selon sa cible client bien entendu), ses usages du digital, les civilités, les langues …

C’est sur la dimension de l’accueil que l’œnotourisme national a d’énormes marges de progression à faire (la France a 20% de touristes de plus que les USA mais trois fois moins de recettes). La fierté d’une production identitaire et fortement qualitative tend à faire oublier les rudiments des métiers de l’hospitalité.

C’est peut-être sur ce dernier critère que les œno-destinations françaises peuvent perdre la compétition.

La roue des perceptions culturelles du vin
La roue des perceptions culturelles du vin

La nature permet de se retrouver          

La nature fait peur ! Elle effraye si l’on n’est pas prêt à franchir le pas de « l’exil » à la campagne – comme retour aux sources. La pratique du vin peut aussi se comprendre comme une compensation symbolique d’une campagne consommée (en ville : la plupart des winelovers sont citadins et disposent d’un certain niveau de vie), comme une dévotion à la vie, comme une appropriation de cette Nature perdue : la nature reste pressante par son appel mais qui effraie par sa vacuité.

Nous avons perdu les moyens et les codes qui nous y relient, nous ne savons plus la lire : d’où l’œnotourisme, qui peut être vu comme un prétexte au retour, une médiation via le vigneron qui interprète les paysages, les traditions et rappelle les rituels oubliés d’une vie rurale.

Le vin c’est le Vivant, ainsi l’œnotourisme peut se comprendre comme une métaphore de la quête de la VIE, un prétexte de retour au primaire, aux rituels d’une vie sauvage fantasmée. C’est un voyage inconscient vers une recherche de soi dans ses sensations (avec le vin, avec les autres, avec l’Humain), une quête de traces de cette vie perdue, une archéologie intime de l’Homme qui était moins urbanisé, moins connecté, en adorant les reliques d’un monde ancien. Souvenons-nous que la vigne est l’une des plantes possible qui incarne l’Arbre de Vie de la Genèse.

Mais cet aspect de l’agritourisme est un voyage dans toute sa réalité, qui en assumant la contradiction du fantasme de la nature, impose une exigence sans cesse rappelée des formes (réservation, langues, les bonnes pratiques de l’œnotourisme, propreté, connectivité…).

Le Vin : un art de vivre

On fait du « lifestyle » pour composer sa vie. Avec le Post-modernisme, il ne se suffit plus de consommer et de produire, on cherche du sens. Une intéressante étude de TripAdvisor : TripBarometer montre que « la découverte de nouvelles cultures est un facteur plus important que la météo dans le choix d’une destination, avec des voyageurs désireux d’élargir leurs horizons et d’expérimenter quelque chose de nouveau, plutôt que d’aller simplement vers une destination ensoleillée

Ainsi, chaque individu devient artiste de son existence (plus Dionysiaque qu’Apollinien d’ailleurs !) et se crée une vie distincte de celle des autres, d’où l’essor des tendances comme la déco (personnalisation du chez soi), le voyage (accumulation d’expériences), du tatouage (hyper-personnalisation de soi).

L’usage du vin – surtout Outre Europe – procède du même phénomène ; les réseaux sociaux, tout en permettant l’expression de ce fait, témoigne de ce besoin de différenciation.

Dans le domaine du marketing en général mais particulièrement celui dédié à l’œnotourisme, cette remarque se caractérise par l’augmentation de la demande de prestations personnalisées, ce qui prouve bien ce souci de besoin de différenciation.

La dimension Culturelle du vin est le pivot plus ou moins visible d’une démarche qui englobe de nombreuses motivations mais qui reste la fondation d’un intérêt qui ne se dément pas.

Hannah ArendtLa crise de la Culture

** Natacha Polony : intervention dans Le Sens des choses, France Culture 29/07/2017 : « Le sucré, le salé et la fonction politique de l’alimentation »

Les 9 bonnes raisons pour intégrer l’œnotourisme au domaine

Il est des évolutions qui poussent un marché dans une direction : la demande d’expérience en matière vinicole est un exemple. Les clients ne veulent plus seulement déguster et comprendre le vin, ils désirent aussi découvrir le lieu où ils ont été fait ! Cette tendance est une aubaine pour le secteur viticole, une opportunité à saisir …

Marc beauchêne1

 

1 – Stimuler les ventes : augmentation du chiffre d’affaire, des marges. Amélioration du fichier client.

2 – Augmenter sa visibilité : localement (marché de proximité BtoB et BtoC) et sur les marchés émetteurs.

3 – Induire la vente à distance : développement de la VPC, de l’e-commerce (abonnement, allocation …)

4 – Améliorer le taux de fidélisation : par la pratique du marketing expérientiel, du marketing direct, par le storytelling.

5 – Développer la notoriété : sortir du lot, devenir identifiable, être différent, amélioration de l’image.

6 – Supporter le marché à l’exportation : informer le visiteur étranger sur le terroir, l’appellation, les cépages. Partager la conception de l’art de vivre, de styles de vin. Propager l’identité et les messages des marques. Indiquer les points de ventes dans le monde (importateurs, restaurants, foires internationales …)

7 – Se professionnaliser : devenir un réel acteur du tourisme, intégrer de nouveaux services, de nouveaux comportements professionnels.

8 – Dynamiser le territoire : travailler en synergie avec l’appellation, intégrer le réseau du tourisme, développer des partenariats.

9 – Participer à l’émergence de l’œnodestination : Devenir acteur du territoire. Stimuler l’économie locale. Développer la notoriété de l’appellation et de la destination. Élargissement de la saisonnalité …

Les 10 bonnes pratiques d’un accueil réussi en Oenotourisme

Accueillir ce n’est pas si sorcier, si l’on veut bien s’en donner la peine. Voici quelques principes à respecter et surtout à toujours garder en tête, même quand c’est la fin de la journée et que des visiteurs arrivent au moment de fermer !
La clientèle asiatique est très curieuse d'apprendre

1 – Le Sourire : la joie, le plaisir, la détente, l’ouverture.

2 – L’Information : signalétique sur site/hors site, panneau tarif prestations, site internet, message répondeur.

3 – La Propreté : lieu d’accueil, du personnel d’accueil, des environs proches, du site en général.

4 – La disponibilité : Etre attentif, adapter les horaires d’ouverture, pratiquer l’empathie, anticiper la demande.

5 – Les Langues : Au minimum l’anglais, pratiqué à tous les échelons de l’entreprise (accueil physique, téléphonique, e-mail, site …)

6 – La Réactivité : Ne pas faire attendre (sur le lieu d’accueil, au téléphone, par retour mail), informer au sujet des prestation, proposer variantes de services …

7 – La compréhension du client : Qui est-il ? Que veut-il ? D’où vient-il ?

8 – L’Expérience : Penser client, chercher la satisfaction client, Etre dans le temps présent. Privilégier l’émotion et le partage. Le client est avant tout un individu et non un touriste.

9 – Les Services : Présenter les vins correctement, proposer une gamme d’activité (animation, exercices, explications, itinéraires …), accès WiFi, aire pique-nique, toilettes disponibles, parking ombragés …

10 – Les Remerciements : Inviter le visiteur à revenir, à garder contact (inscription newsletter, FB, Tweeter …), suggérer à donner son avis sur TripAdvisor,

L’accueil à la cave comme stratégie d’entreprise et logique territoriale

Les Rencontres nationales des Vignerons Indépendants de France (VIF) ont eu lieu les 15 et 16 avril 2014 dans l’Hérault : la conclusion fut de reconnaître la pleine justification du tourisme viticole en précisant qu’il fallait « développer une activité touristique qui doit d’elle-même être rentable sans y investir tout son temps ».

On ne peut que louer une telle assertion !

Mais l’oenotourisme ne fonctionne pas aussi simplement, il ne s’agit pas simplement d’ouvrir un caveau et de proposer des dégustations pour en retirer un bénéfice immédiat, développer ce discours peut induire une méprise préjudiciable sur les évolutions stratégiques des vignerons.

 

Accueil Vignoble de Loire

De nombreux paramètres à prendre en compte.

Si les vignerons ont pour point commun la production agricole, les variations de conditions et de modalités peuvent être considérables. Leur potentiel d’accueil très variable (taille de la structure, le patrimoine bâtit, le savoir être, le paysage, la proximité des grands centres et des flux, la notoriété …) entraîne une extrême diversité dans les réponses possibles et les adaptations stratégiques pour réaliser un accueil de qualité.

De plus, les clientèles sont très diversifiées avec pour chacune d’entre-elles une quantité de nuances de demandes et de comportements.

Ces contraintes n’empêchent pas le développement d’un accueil efficace et rentable. Apprendre à recevoir et s’adapter aux exigences du tourisme n’est pas insurmontable et peut vraiment stimuler l’économie d’un domaine viticole, d’une appellation, d’une région (par exemple l’impact économique du tourisme du vin dans le bordelais).

 

Il ne faut pas prendre en compte l’argument rentabilité comme unique facteur stratégique !

Vendre peut être un argument en effet, encore faut-il pouvoir monter en puissance et progressivement professionnaliser la structure d’accueil pour aboutir sur un parfait phasage avec la demande.

Le vigneron n’est pas seul. En France nous avons l’avantage de profiter d’un réseau très riche d’intercommunalités, d’institutionnels et de professionnels qui sont là pour harmoniser et dynamiser l’économie œnotouristique.

Charte d'Accueil Coteaux du Lyonnais

 

L’offre individuelle de la cave doit s’harmoniser avec la dynamique territoriale. Les notoriétés, les flux, les potentiels touristiques de chaque région viticole sont tellement variables qu’il n’existe pas de solution type : le succès doit se trouver dans la combinaison des motivations entrepreneuriales des vignerons, la dynamique locale, la réputation territoriale (terroir + destination) et le niveau d’équipement territorial global (aéroport, moyen d’accès, connexion internet … ).

Le travail de développement dépend autant de l’initiative individuelle que de l’effort collectif !

Jacques Berthomeau, Contrôleur Général au ministère de l’agriculture, lance un coup de gueule contre le tout communication, arguant que le monde viticole se lance dans une débauche de messages « indigestes, illisibles … dans un univers privilégiant l’instantanéité, la rapidité » : ce n’est pas en faisant beaucoup de mouvement que l’on nage le mieux !

Il souligne aussi l’une des particularités du monde vigneron disant que « les gens du vin s’adressent aux gens du vin sans même chercher à hameçonner ceux pour qui ça n’est qu’une boisson, certes sympathique, pour accompagner repas ou fêtes. »

 

J’ai envie de dire que l’œnotourisme suit cette voie floue et peut aboutir vers l’amatourisme. Combiné et amplifié par l’effet de « bulle » communicante engendrée par l’usage des réseaux sociaux, les vignerons risquent la déception qui pourrait être grande si l’on ne prend pas soin de montrer les bonnes pratiques et de coordonner et canaliser les énergies.

Charte d'Accueil Ventoux

 

L’œnotourisme n’est pas un moyen, c’est un projet en soi.

En effet, l’œnotourisme peut doper les résultats d’un caveau, mais considérer cette activité par ce seul côté de la lorgnette, c’est réduire la portée de cette branche du tourisme et du vin. Les effets induits sont très importants en terme de développement d’image et de dynamique locale.

Pour cela il faut suivre une stratégie intégrée dans une logique d’entreprise totalement assumée : même en ne vendant rien le jour de la rencontre, la politique d’ouverture du caveau déclenche des ventes à distance, transforme le touriste en ambassadeur/prescripteur de la marque, ce qui va vitaliser l’exportation du vin, de l’appellation, et de la région-destination du pays.

 

Faire de l’œnotourisme suppose élargir son angle de vue : serré à l’échelon de la production et du terroir ; complètement ouvert au niveau du tourisme et de la … planète ! C’est le paradoxe pour le vigneron, faire le grand écart entre un métier du produit et un métier du service.

 

Le substrat humain dans le domaine de l’œnotourisme est la matière première, à manipuler avec précaution. Deux échelons doivent être distingués :

  • Celui du monde professionnel ou BtoB qui a ses règles, son langage, ses codes qu’il est important d’intégrer pour gagner en efficacité organisationnelle et promotionnelle.
  • L’autre, celui du client ou BtoC qui s’aborde différemment en répondant à ses attentes et lui procurant des expériences positives qui généreront des achats.

 

L’œnotourisme est un métier en soi – toujours en cours de définition – dont il est nécessaire de comprendre les règles pour obtenir des retours sur investissement. Peut-être que l’innovation doit se trouver dans la gouvernance globale du territerroir en s’appuyant sur une logique horizontale de participation où l’individu et le groupe, à l’image de l’Internet, se pensent et se construisent en réseau, un œnosystème.

 

L’œnotourisme appartient à la société du spectacle

Avec le développement de l’image, tout devient prétexte à spectacle : l’architecture devient un objet spectaculaire (le musée Guggenheim de Bilbao, la Fondation LVMH à Neuilly …), le packaging tend parfois à devenir plus important que le produit, les véhicules aux formes originales sont prétextes à valoriser leur propriétaire … la liste est longue.
Se montrer sous un certain angle devient une nécessité, un code social, un rituel nécessaire pour exprimer intuitivement qui l’on est.

 

Le tourisme peut mettre en scène un vignoble, le vin apporte une image positive au territoire.
A l’échelle des territoires il devient important et stratégique de prendre en considération ces évolutions.

 

Mettre en scène un pays œnotouristique résulte de la combinaison de choix individuels des vignerons et des prestataires touristiques mais aussi de la politique publique, des orientations des élus et des collectivités pour définir une nouvelle stratégie territoriale.
Il y a concurrence entre les destinations œnotouristiques à tous les niveaux (continents, pays, régions, appellations). Le choix des visiteurs ne se porte pas uniquement sur la qualité intrinsèque du vin, de la notoriété d’un terroir ou la célébrité d’un château.

 

L’ennui est l’ennemi

Ce choix est le fruit de perceptions, qui ne sont pas toujours d’ordre rationnel, qui se portent aussi sur l’idée de la Culture du pays, de la qualité des paysages, de l’agrément que l’on suppose pouvoir en tirer … Dans ce domaine, l’ennui est l’ennemi, un territoire n’est attractif que s’il propose des activités.
Rapporté au tourisme du vin, la disponibilité des domaines est l’élément clé. La qualité et la notoriété des vins sont insuffisantes pour insuffler des flux favorisant une dynamique positive et enrichissante (volume d’affaire, qualité moyenne du professionnalisme, niveau de développement du réseau œnotouristique, interactions à l’échelle du territoire…).

Des exemples fleurissent, sous forme événementielle, comme les Balades des Grès de Montpellier, du festival musical de Bach à Bacchus de Meursault, ou de Verre en Vigne. Mais c’est l’animation dans sa globalité qui doit être prise en compte : la disponibilité des commerces, l’amplitude de l’ouverture des caveaux, l’offre en hébergement et le dynamisme des prestataires touristiques qui travaillent sur ce « territerroir« .

 

 

On ne vient par hasard dans un vignoble
On ne vient par hasard dans un vignoble

La prise en compte de la demande – à l’échelon du territoire – est capitale !
Que désire le visiteur œno-curieux ? Il cherche avant tout à se divertir et s’amuser, apprendre et découvrir, faire des rencontres : avoir une expérience.

 

L’achat de vin devient secondaire, bien que très important pour de nombreux visiteurs. Ceci est à intégrer lors de l’organisation d’événements liés au tourisme du vin.
Cela induit des orientations fondamentales dans les choix que les opérateurs œnotouristiques auront à suivre : le comportement des personnels d’accueil, la communication des domaines et des institutions viticoles, les choix de services à proposer aux visiteurs.

 

Si le client refrène ses achats, la cause trouve de multiples raisons, qui ne sont pas liées à la qualité des vins ou de la performances des hôtes : les réponses sont évidemment complexes.

 

 

Un message d’ouverture et de professionnalisme
Souvent, on prend prétexte de la faiblesse du CA lié à la vente directe au caveau pour ne pas ouvrir un domaine. Cette décision peut entraîner une perte du capital image et revient à se priver d’un moyen de communication très puissant tant sur le plan individuel du vigneron et de sa cave que celui de la collectivité, d’une appellation ou d’une région viticole.

 

Le visiteur (national mais surtout étranger) peut en retirer la sensation d’avoir visité un pays peu ouvert au monde et rentrer avec un sentiment négatif d’être passé à côté, d’où la floraison exponentielle de sites d’avis. Le marketing se construit maintenant en fonction du regard et des retours de ces millions de touristes heureux ou mécontents !

 

 

L’ère de la mondialisation implique un changement des comportements des politiques d’accueil des régions viticoles : la réponse se trouve entre la bonne entente des vignerons (cheville ouvrière et raison d’être de l’œnotourisme), des collectivités et des institutions (du tourisme, du vin, administrations) qui orientent et dynamisent les choix, et du secteur privé du tourisme qui met en action l’ensemble. Ne perdons pas de vue que nous sommes dans un œnosystème.

 

 

L’objectif est de délivrer un message d’ouverture et de professionnalisme aussi fort que les autres grandes régions viticoles de par le monde.
La théâtralisation du territoire est le secret du succès – ce qui passe par la concertation de tous les intervenants du vin et du tourisme.

 

 

Cela aura pour incidence d’augmenter la fréquentation touristique en quantité et d’étaler la saisonnalité ; de propager la renommée du vignoble et faciliter la vente dans les pays d’origine tout en garantissant un certain volume de vente directe.
Depuis bien longtemps, nos vins se retrouvent partout sur le globe, ne nous étonnons pas que le monde désire découvrir où et comment le vin a été fait !

 

Œnotourisme durable

Le développement durable est un concept qui prend de plus en plus d’importance dans l’esprit des éco-citoyens qui véhiculent les notions de solidarité intergénérationnelle, et cela à l’échelle planétaire.

 

Ce mouvement qui aspire à responsabiliser le monde économique et l’harmoniser avec son environnement humain et naturel, trouve un lien logique avec les secteurs de la viticulture et du tourisme.

 

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Pour le professionnel de l’œnotourisme cela revient à identifier les « responsabilités sociétales » et à adapter des réponses tangibles à ce questionnement : lesquelles de mes pratiques sont en contradiction avec la société et les écosystèmes ?

 

Les clients vont regarder de plus en plus la dimension durable du fournisseur

En matière viticole, les distributeurs étrangers deviennent de plus en plus sensibles à cet argument, nul doute que l’œnotouriste ne tende à prendre conscience de ces enjeux. Il agit maintenant en fonction de ses responsabilités nouvelles et demandera à tous acteurs économiques le même respect de ces valeurs.

 

En dehors du rapport traditionnel qualité, prix, distribution, image, rareté…la dimension éco-citoyenne et durable va influencer les choix de consommation. La relation de confiance (BtoB et BtoC) pourra aussi se trouver dans les critères concurrentiels où le champ de l’éthique exercera une influence grandissante.

 

Il est tout à fait imaginable que dans les années à venir, des distributeurs type OTA où chaînes hôtelières internationales, pour satisfaire la demande sans cesse plus écologique, veilleront à sourcer des prestataires fournisseurs au bilan carbone modéré.

 

Le concept d’énergie grise, plutôt pris en compte dans les grands groupes actuellement, va descendre dans la totalité de la chaîne de production et entrera dans la logique de la création de valeur en terme de séduction client. Dès lors, un vigneron économe en eau et en diesel, des hébergements très bien isolés et producteur de leur propre énergie ou des VTC utilisant des véhicules électriques gagneront dans le domaine des avantages concurrentiels.

 

La chaîne des métiers de l’œnotourisme a aussi la possibilité d’investir la dimension responsable en sélectionnant des hébergements optimisés (consommation d’énergie …), en rationalisant les trajets, en sollicitant des intervenants locaux et en leur assurant des rémunérations justes, en favorisant la visite de caves respectueuses de l’environnement.

 

A l’échelle réceptive

Le secteur du tourisme du vin agit dans le sens du tourisme durable en créant des richesses et participant à leur répartition (facteur économique).

 

Le réseau agence-hôtel-restaurant-cave-administration (l’œnosystème) participe à la diminution de l’érosion sociale en garantissant un ralentissement de l’exode et assurant une vie rurale de qualité. Cela participe à la valorisation d’un territoire par le travail sur le terroir, et engage les valeurs socio-culturelles des populations locales (facteur social).

 

L’impact de ces choix permet d’entretenir les paysages par la fonction « d’urbaniste-jardinier » des vignerons, de ralentir le bétonnage en valorisant les zones agricoles, de valoriser les constructions et patrimoine vernaculaires, et de préserver l’aspect endémique de la faune et de la flore (facteur écologique).

La mondialisation nous oblige à nous adapter

La mondialisation envahit notre quotidien … Le marché de l’œnotourisme s’étend à la terre entière.
Gageons que dans quelques années le concept concernant les activités de « loisir », actuellement orientées vers un public de proximité, englobera les visiteurs nationaux. Le tourisme du vin selon ce principe ne regardera que les visiteurs étrangers.

Il s’agit de prospective, mais il me semble bienvenu de se positionner selon ce type de vision pour définir la stratégie de développement et la politique d’accueil.

Les enjeux de l'oenotourisme sont actuellement sur la professionnalisation de l'accueil
Les enjeux de l’œnotourisme sont actuellement sur la professionnalisation de l’accueil

L’internet met les prestations à la portée de tous les curieux du vin, les amoureux des paysages viticoles, les pratiquants des crus nationaux : le monde rapetisse.

 

Le secret de l’accueil : s’adapter au client

Madame Stael* dans un de ses romans fait parler un personnage sur la beauté des ruines de Rome « J’ai fait tout ce que j’ai pu … pour trouver quelque intérêt à ces ruines … c’est un préjugé que l’admiration de tous ces débris couverts de ronces … qu’on ne peut admirer qu’à force d’érudition. Un plaisir qu’il faut acheter par tant d’études ne me paraît pas bien vif à lui même … »

 

L’auteur aurait pu très bien décrire un voyageur dans un vignoble. Avec le langage actuel on dirait « j’vais pas m’prendre la tête pour aimer un vin » … et pourtant cette personne aime le vin, à sa manière. Le plaisir du vin, simple ou érudit est légitime !

 

Le visiteur se déplace avec sa culture et ses habitudes, et il est normal qu’il s’attende à obtenir le même niveau de services qu’il peut avoir dans son pays d’origine. D’une certaine manière, les flots de touristes américains ou asiatiques nous montrent la voie à suivre. Il s’agit là d’obtenir un certain standard international qui uniformise l’ensemble des métiers du tourisme du vin (vendeurs de voyages, transporteurs, hébergeurs et animations/prestataires).

 

Le monde du tourisme en France a parfaitement intégré les nécessités des échanges touristiques mondiaux, l’effort actuellement concerne principalement le monde viticole, s’il désire amplifier son implication dans ce nouveau secteur d’activité.
Ce besoin d’adaptation ne concerne que la partie « service » du domaine viticole et ne regarde en aucun cas, la fonction « production », qui reste le métier initial.

 

Le défi de l’œnotourisme : une culture mondialisée du vin

Les changements ont déjà commencé, certaines régions montrent la voie, il ne faut qu’harmoniser les pratiques et veiller à ce que les acquis qualitatifs se maintiennent.
Les champs d’application de ces améliorations concernent l’organisation, la professionnalisation du personnel d’accueil, la mise en scène des prestations : principalement des améliorations de type plus comportemental que technique ou matériel.
Le défi principal de toute cave qui désir s’orienter vers l’œnotourisme, est d’acquérir la culture du tourisme, chose tout a fait réalisable si l’on en fait un objectif.

 

Standardiser l’accueil ne dénature pas la fonction de vigneron, les deux métiers sont indépendants, il ne s’agit que de les rapprocher !

*Madame Stael : Corinne ou li’Italie – page 146 Gallimard collection Folio Classique