Le vin devient un univers de femme

Le vin est attaché à un ensemble de rituels qui constituent un fond de traditions plus ou moins archaïques : lors des repas familiaux, ces grandes messes conviviales qui rythment les saisons, la femme est aux fourneaux et l’homme à la cave. Même si davantage d’hommes cuisinent, les femmes laissent encore le choix du vin à l’homme. Ainsi ouvrir une bouteille, servir le vin, échoit à l’homme.

Ceci me semble plutôt un signe de l’attachement à des coutumes qu’à des interdits culturels, si l’on doit en juger à l’intérêt croissant que les femmes portent au vin. Les vigneronnes sont de plus en plus nombreuses et montrent au moins la même capacité que les hommes dans cette fonction, sinon plus !

 

Le site tcheen-tcheen.com est un exemple ce cette évolution et prétend « faire en sorte que les femmes prennent le pouvoir sur le sujet du vin, en le rendant fun, léger et sans complexe ».

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Les femmes intéressent le marketing

Des clubs féminins se créent pour la promotion des vins (Femmes Vignes-Rhône par exemple), la dégustation (L’école des Femmes du Vin) un collectif ayant l’objectif d’augmenter la visibilité des Femmes du vin (Women Do Wine), c’est un signe.

 

De plus en plus des femmes œnologues et sommelières gèrent de grandes maisons. Le marketing se penche sur la question, les études fleurissent, les chiffres se mettent à parler : 70% du vin est acheté par les femmes.

 

Leurs goûts ont été aussi analysés : le rouge derrière le Champagne, et bien que le style léger et fruité tienne leur préférence, nombreuses sont celles qui aiment le style puissant et concentré.

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A l’étranger, le vin fait fureur parmi les femmes, surtout dans les pays anglo-saxon, où ce breuvage tant à devenir celui des dames, les hommes restant à la bière. Le vin est un symbole de raffinement là-bas, pas étonnant qu’il se féminise !

 

La science avec le neuro-marketing, avance très rapidement explique la tendance. Il ne s’agit pas uniquement de développement culturel mais aussi de constitution physiologique : le professeur Brésilien Lent a récemment découvert que les bulbes olfactifs féminins sont plus riches de 43% en neurones que ceux des hommes !

 

Une clientèle en émergence, surtout hors de l’Europe

Les winetours que je mène avec les nord-américains sont composé à 60-70% de femmes, il n’est pas exceptionnel de ne compter aucun homme dans certaines de mes promenades vigneronnes.
Le monde de l’œnotourisme devrait tirer parti de ces changements.

Les femmes s'intéressent de plus en plus au vin.
Les femmes s’intéressent de plus en plus au vin.

Les créateurs de produits touristiques pourraient y trouver une nouvelle niche à développer, les institutions du vin ont là un champ original pour communiquer et les vignerons devraient chercher à s’adapter vers une clientèle qui n’a pas fini de monter en puissance.

 

Pour preuve le concours international organisé en Espagne & parrainé par l’OIV « que se centra en reconocer el importante papel de la mujer en el sector del vino » qui a pour objectif de reconnaître le rôle important tenu par les femme dans le monde du vin. Ce prix visant à rompre les mythes classiques comme leurs préférences pour les vins blanc & doux par exemple et en reconnaissant le rôle croissant de la production à la consommation.

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Cette quête de compréhension continue avec le périple de quatre jeunes françaises en route dans les vignobles de la planète pour un projet worldwinewomen de recherche et d’analyse du rôle des femmes dans un secteur viticole mondialisé.

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Le vin devient de plus en plus un univers féminin, et c’est tant mieux !

 

Le mystère des vins français

Pour les visiteurs d’outre-Europe, nos vins ont quelque chose de différent, et ils l’expriment souvent en utilisant l’expression : « vins français » !
Que veulent-ils dire par là ? Est-ce en comparant nos produits aux vins Californiens, Argentins ou Australiens qu’ils en sont venus à identifier une sensible distinction ?

 

Il est vrai que la frontière entre les perceptions émotionnelles d’une Culture et les sensations propres liées à une dégustation est très poreuse : ils associent l’élégance de nos vins à notre art de vivre. Pour paraphraser Descartes, cela donnerait une formulation comme ceci : La vie en France est harmonieuse donc les vins sont fins !

L'image des vins de France n'est perçue de la même manière selon votre origine.
L’image des vins de France n’est perçue de la même manière selon votre origine.

Nous Français, sommes porteurs de cette élégance sui generis, nous ne la voyons pas. Ainsi le vigneron, presque inconsciemment, travaillera sa vigne en harmonie avec sa vie et ses goûts personnels. Cela a donné naissance au cours du temps, à un système assez compliqué pour la plupart, y compris pour nous Français : le principe des terroirs et des appellations.

 

Les œnotouristes parlent de style, de « moins de lourdeur », de « plus d’élégance », de finesse, d’équilibre, de « plus de complexité »… Ces expressions et cette subtilité appréciée n’ont rien de magique, elles sont le fruit du travail et de choix esthétiques : faire des vins de terroir implique un investissement humain plus qu’économique.

J’ai trouvé une définition éclairante sur « www.winemag.com« , site américain : « The style of French wine echoes that of the French themselves — elegant, well-dressed, showing an appreciation for the good things of life but never to excess ».

 

Les vins Français seraient donc des vins plus « sociaux » et moins « business » ?

Si le concept de « vin Français » intégré par les visiteurs étrangers correspond à la perception de vins de terroir, le monde viticole en France possède un avantage concurrentiel capital : le savoir-faire est notre intelligence économique.
Le tourisme du vin peut alors devenir le vecteur idéal pour promouvoir ce concept, enfoncer le clou sur notre exception culturelle viticole, faire la différence avec d’autres pays producteurs de vin.
La marque France prend un sens qui mérite toute notre attention, les pieds dans la vigne et le nez dans les taux de remplissage.

Faites des Chinois les Américains de demain

Identifiée à la culture Méditerranéenne il y a 2000 ans, la vigne est devenu symbole de la chrétienté,  puis s’est exportée dans les pays du nouveau monde au 17ème siècle.
Il y 10 ans encore, les visiteurs Texans ou Newyorkais étaient souvent sujet de plaisanterie pour leur manque de savoir-vivre au sujet du vin.

 

La demande des oenotouristes devient plus précise

Leurs exclamations admiratives pour les rouges trop lourds et patinés, leur approche indistincte des appellations, leur penchant pour les goûts boisés, leur émerveillement facile pour notre patrimoine viticole et leur incompréhension rédhibitoire pour la notion de terroir faisaient de cette clientèle l’objet de soupirs exaspérés et de sourires en coin : l’américain avait la réputation du bon client fâcheux.

 

Cette image du redneck au dollar agressif s’est volatilisée au profit d’une évolution bien plus positive : aujourd’hui  l’approche est bien plus modeste, le désir d’apprendre est devenu stimulant, les vins plus équilibrés et nuancés sont maintenant l’objet de leur quête. On considère désormais le vin outre Atlantique comme objet d’étude et d’apprentissage.

La clientèle asiatique est très curieuse d'apprendre
La clientèle asiatique est très curieuse d’apprendre
Le marché Chinois se globalise très rapidement

Depuis peu, le marché Chinois s’est ouvert en libérant des flots de néo consommateurs plus habitués au thé qu’au fruit de la vigne. Combien de fois m’a t-on demandé de quelle espèce étaient les petits arbres plantés en rang, partout dans les paysages du sud de la France ? Ils parlaient de la vigne bien entendu !

 

Leur regard toujours derrière l’objectif, leur naïveté parfois confondante au sujet des appellations, leur désintérêt pour les accords gastronomiques … a de quoi nous désarçonner. Ils trouvent parfois trop tannique un vin primeur comme le Beaujolais !

 

Comprendre le client est toujours la démarche essentielle. Ainsi au-delà de l’aspect sensoriel, le symbolisme explique leur préférence pour le vin rouge qui représente 80% de la consommation : La prédominance du vin rouge en Chine peut être attribuée au symbolisme culturel de bonne augure et de prospérité associé à la couleur.

 

Mais regardons un peu en arrière, et souvenons nous que les yankee d’antan, amoureux des vins surpuissants aux arômes gonflés, sont parfois plus curieux qu’un bon français habitué à ses appellations rituelles.

Un peu de pédagogie, un peu de patience, la clientèle Chinoise pourra aussi atteindre un tel niveau de subtilité, nous avons, en matière de vin, 2000 ans d’avance sur eux.

 

En matière de pratique digitale, l’occident n’a plus rien a leur apporter, il semble même que les citadins diplômés, jeunes ou moins jeunes, qui constituent le gros du flux oenotouristique sont hyperconnectés et réservent tout sur le smartphone via WeChat et Ctrip et achètent leur vin on-line sur Epicurio

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Voyages et gastronomie sont au 1er et 4ème poste de leurs loisirs préférés, cela devrait nous inciter à faire un peu plus d’effort pour comprendre cette clientèle prometteuse.

Remercions les de venir ici pour soutenir une production nationale, encore très fortement exportatrice, que la nation française néglige par sa législation parfois incohérente et sa consommation décroissante. Merci Messieurs les Chinois !

 

Cet article édité en janvier 2014 trouve un écho saisissant dans la réussite chinoise au championnat du monde de dégustation à l’aveugle que relate la RVF…j’ai eu « du nez » pour reprendre la métaphore de l’analyse sensorielle…Je prends pour preuve ce succès de l’Empire du Milieu comme précurseur d’un marché oenotouristique qui va monter en puissance…préparons-nous !

 

Un article publié par le Figaro.fr en juillet 2017 va dans le même sens, on y trouve cette phrase qui reflète exactement le thème de cette présente réflexion : les voyages à l’étranger dans des régions productrices de vin notamment en France et en Italie, l’importance des réseaux sociaux sur lesquels il faut mettre « les photos les plus incroyables », entraînant des « changements culturels » qui influencent les modes de consommation.

Un lien qui peut aider à comprendre les visiteurs Chinois