Stratégie œnotouristique de l’Occitanie 2021

Entre septembre 2020 et janvier 2021, j’ai construit en collaboration avec les services du CRTL et de Céline Guérin, Chargée de Mission agri-œnotourisme, la stratégie œnotouristique de l’Occitanie en définissant le positionnement et travaillant avec les 4 bassins à la précision de leurs identités.

Le plan d’actions et les recommandations ont été communiquées auprès des acteurs de l’œnotourisme de la région lors d’une visio-conférence le 12 avril 2021

Comment transformer son offre œnotouristique en propositions durables ?

A l’image de la transition d’une production viticole qui passerai du conventionnel vers le bio, l’approche durable implique une adaptation de la vision du vigneron touristique et sa mise en action en pratiques vertueuses.

Vert c’est plus joli à condition de tenir ses promesses

Le virage écologique est une tendance de fond. On le voyait venir depuis quelques années, la crise sanitaire a accéléré le mouvement radicalement !

La tentation marketing d’introduire un message éco-responsable dans l’offre standard est forte : pour un coût moindre, on obtiendrait une certaine visibilité et un regard bienveillant de la part des consommateurs sans cesse plus sensible à cette problématique.

On comprend bien les avantages, qui pour un investissement faible permettrait de se différencier et de capter une nouvelle clientèle.

Mais il s’agit là d’un jeu dangereux : « Mentir ne sert qu’une fois » disait Napoléon !

Les visiteurs séduits par cette offre, en découvrant la supercherie du Green Washing et de cette expérience déceptive, s’en souviendront en la black listant et même peut-être en pratiquant un « bouche à oreille » qui serait défavorable.

Car, pour beaucoup, consommer vert c’est consommer éthique. La confiance est fondamentale dans la relation client, elle doit se fonder sur un partage de valeurs qui unissent, rassurent et permettent de se projeter dans une effort collectif d’amélioration du bien commun.

Le Château des Tourtes à choisi la solution La Bulle Verte

La communication par l’exemple

En adaptant une phrase trouvée dans le manifeste * d’Andréas Webert et d’Hildegard Kurt, « la vigne n’est pas une ressource à exploiter mais une source de vie, terreau d’identité » on peut définir une vision entrepreneuriale consistant à faire de l’accueil durable un outils d’attractivité.

Il est important de bien faire correspondre les gestes aux paroles. Ainsi, toutes les actions de la propriété viticole doivent être tangibles pour le visiteur.

La consommation hédoniste de l’œnotourisme & de l’agritourisme est principalement intuitive et fonctionne sur des logiques d’appropriation. Le visiteur achètera le plaisir et le bien-être du voyage, il choisira le prestataire pour sa promesse et la perspective de progrès de soi incluses dans ce programme.

Ainsi le contenu qui permettra au visiteur de participer à l’amélioration de la planète doit aller au-delà des discours, elle doit être réelle et perceptible.

Bien-sûr, les démarches de labellisation (Clé Verte …) fondées sur le respect de critères strictement observés sont des arguments d’importance. Mais, dans la logique de participation et de coproduction transmoderne**, le citoyen client écosensible appréciera cette implication dans la protection du vivant en évaluant la capacité à mettre en œuvre des actions sincères.

Explorama donne du sens et permet une relation intuitive au paysage

Taper dans le M.I.L. : des outils pour rendre visible votre démarche durable

C’est parce que l’on sera capable de transformer une idée en réalité que l’authenticité de la démarche durable sera interprétée comme justification de la volonté durable du domaine : les relations avec le terroir et la marque seront d’autant plus fortes et pérennes.

Les options choisies par l’acteur œnotouristique sont variées. Dans le domaine des « activités » je distingue trois entreprises complémentaires qui permettent réellement de procurer un bénéfice client et un avantage concurrentiel.

  • Mobilité : La Bulle Verte
  • Interprétation : Explorama
  • Local : Wine’n Go
  1. La Bulle Verte offre la possibilité au visiteur d’une pratique reenchantée du paysage avec les bicyclettes électriques. Cette expérience renouvelée se situe à la fois sur le confort d’usage, sur la sécurité (recharger son véhicule), sur la nouveauté (autonomie, autre temporalité, relation au terroir renouvelée), sur un engagement (vivre en harmonie avec son environnement).

Les avantages pour le metteur en marché (vignerons, hébergeurs, communes …) sont nombreux. En installant une station de rechargement, ces derniers s’inscrivent dans la tendance dynamique d’une demande en pleine croissance. La visibilité et la différenciation est une conséquence qui sera génératrice de flux et de valeur (chiffre d’affaire, fidélisation, partage social …). Cela permet enfin d’affirmer un positionnement slow et durable de l’entreprise.

  • Explorama donne du sens. C’est un outil qui aide l’entreprise viticole (mais aussi des camping, parcs d’attraction, institutions territoriales …) à valoriser un patrimoine naturel ou culturel. Entre information et gaming, cette solution enrichit la compréhension des lieux visités et respectant la liberté de mouvement de l’utilisateur, son rythme propre et la dynamique du groupe.

Pour le professionnel, c’est une opportunité de diversifier son offre et de proposer un prétexte de retour pour aller plus loin dans la rencontre visiteur / terroir. Ce moyen didactique partage les messages et les valeurs de la marque en animant, divertissant et en informant la clientèle. Le visiteur sera surpris et il reviendra.

Wine’n Go pense la relation client pour garder la valeur sur le territoire
  • Wine’n Go pense à l’usager et à son confort. En utilisant cette application, le professionnel garde contact (avant,pendant, après) avec le visiteur en lui recommandant les « bons plans », en lui faisant bénéficier du réseau local, en lui permettant d’avoir le sentiment d’être du pays. C’est autant un outil de conciergerie qu’un moyen de communication : votre site et celui de vos partenaires aident le visiteurs en l’assistant à construire son séjour « à sa mesure ».

Générateur de chiffre d’affaire direct (pour le prestataire et ses partenaires) en gardant la valeur sur le territoire (cela participe à l’affirmation RSE de l’action réceptive) c’est une manière de rassurer le visiteur en l’accompagnant digitalement. Il s’en souviendra et recommandera auprès de ses proches, ou même il réservera à nouveau.

La crise sanitaire accélère le changement, l’envie de voyager ne tarit pas mais elle est transformée par une conscience durable plus exacerbée.

Le producteur agricole, le professionnel du tourisme et le vigneron en phase avec la vision durable du tourisme ont ici avec ces trois solutions l’opportunité de sortir du storytelling standard et de mettre en action une vision avec des offres durables : le client déculpabilisé n’en sera que plus reconnaissant !

Avec ces trois outils, l’acteur œnotouristique ou agritouristique peut transformer son offre sans totalement remettre en cause son management et son plan d’action à court terme. Voici des moyens qui apportent de la valeur pour tout le monde – visiteurs et professionnels – une redéfinissant une promesse sur des bases sincères et positives.

*« Réensauvagez-vous » – Edition le Pommier – d’Andréas Webert et d’Hildegard Kurt

**Définition de Transmodernité se référer au livre de Rosa Maria Rodriguez Magda – « La condition transmoderne » – Edition l’Harmattan

3ème Event d’Opent Tourisme Lab : l’Œnotourisme Durable

Le 14 septembre 2020 j’ai eu le plaisir d’animer la matinée de réflexion autour de deux tables rondes que j’ai organisées pour l’accélérateur Nîmois Open Tourisme Lab : sur la thématique « l’Œnotourisme Durable : Pourquoi devient-il urgent d’y penser ? »

Pour la seconde fois, l’Event a eu lieu chez Gérard Bertrand, où 150 personnes ont bravé le stress de la Covid19.

Elles sont venues pour assister aux deux tables rondes. Elles ont participé au concours de pitch, gagné par Mélanie Mambré de Vaovert, échangé à l’atelier Barcamp, se sont renseignées au showroom des start up et travaillé lors des rencontres b2b.

Table ronde 1 : Quelles sont les nouvelles aspirations du voyageur et pourquoi cherche t-il à découvrir les territoires viticoles de manière plus éco-responsable ? Quelles correspondances entre une consommation de vins BIO croissante et une expérience de visite réussie ?

De gauche à droite : Hervé Hannin, Guillaume Cromer, Isabelle Cardouat & Frédéric Nau

-Guillaume a rappelé l’urgence climatique et la nécessaire réflexion à mener collectivement pour agir sur des choix qui mènent vers moins de consommation de Gaz à Effet de Serre (GES).

-Isabelle a précisé la notion de Slow en montrant les enjeux ainsi que les conditions horizontales de réflexion collective pour arriver à une intégration privée/public efficace.

-Hervé a souligné l’aspect traditionnel d’une viticulture en manque d’innovation, en prenant en compte les contraintes sociétales à intégrer et en esquissant des propos sur le management politique pour évoluer vers plus de sobriété.

-Frédéric a parlé du client et de son soucis de l’engager dans une compréhension de la destination en offrant des clés d’appropriation et d’interprétation du pays : le tourisme pour lui ne doit pas être prédateur.

Tous les quatre ont co-construit une vision de l’œnotourisme durable et réaliste dans ce temps obligatoirement trop court : beaucoup de questions n’ont pas été posées pour faire le tour du sujet !

Table ronde 2 : Regards croisés d’acteurs engagés dans l’œnotourisme durable

-Morgane nous a conté l’importance de la conviction de l’équipe dirigeante pour convaincre et éviter le « green washing » afin de toucher toutes les parties prenantes que sont clients, collaborateurs, fournisseurs, partenaires médias et habitants locaux.

-Xavier nous a apporté un éclairage sur l’ISO 26000 qui est une norme de responsabilité sociétale. Il nous a dit combien la structure coopérative était logique et importante pour un management plus horizontal et inclusif dans le territoire.

-Lionel, très partisan de l’expérience client, a insisté sur les structures à décloisonner et la complémentarité entre institutions, médiateurs privés et vignerons. Pour lui, le point de départ de l’œnotourisme se fait à la vigne, il doit être éco-responsable et collaboratif.

-Enric, Catalan de Subirats, a expliqué ce qu’était le label Biosphère auquel son entreprise est affiliée. Il a ensuite raconté ce qu’à fait ce village de vignerons pour ré-ouvrir la ligne RENFE depuis Barcelone, équiper l’ancienne gare d’un office de tourisme et d’un magasin de vélo pour donner l’opportunité sans véhicule de découvrir le terroir de manière douce.

Merci à ces huit intervenants qui ont tous participé à faire évoluer ce concept d’œnotourisme durable encore jeune.

De gauche à droite : Morgane le Breton, Lionel Martinez, Enric Santisteban & Xavier Gomart

A retenir :

-1 Economisons la planète : Installer des objectifs chiffrés, co-gérés par les entreprises et la destination pour une mobilité plus responsable, une économie de l’eau, le respect des écosystèmes, réduction des usages de produits non naturels …

-2 Pensons ensemble : Mettre plus d’horizontalité dans la prise de décision pour influencer les collaborateurs dans l’entreprise et les habitants de l’œnodestination.

-3 Expliquons et démontrons : Donner les outils de compréhension aux parties prenantes pour persuader et renforcer l’estime et les liens avec la démarche

-4 Changeons de point de vue : Instaurer des critères d’analyse qui sortent du quantitatif et convenir d’un référentiel basé sur le respect du vivant et du local

-5 Installons une vision sur le long terme : Miser sur une politique moins « courtermiste », moins comptable en misant sur une gestion circulaire de l’économie locale, en fixant la valeur économique œnotouristique et en pensant les fonctions régénératives des activités locales.

Comme le disait Guillaume Cromer « nous avons dix ans pour réduire de 60% nos émissions de GES pour suivre les décisions de la Commission Environnement de l’Union Européenne » … L’œnotourisme doit prendre sa part de travail pour atteindre cet objectif !

Vers un œnotourisme durable

De Romy Ducoulombier Journaliste et fondatrice du site « Nuits dans les Vignes » www.nuitsdanslesvignes.fr article publié sur le site www.toutlevin.com

L’œnotourisme est en pleine mutation. Celle-ci doit tendre vers une logique responsable et durable. C’est l’analyse de Marc Jonas, consultant et spécialiste de l’œnotourisme.

« L’œnotourisme, c’est faire un voyage au cours duquel on a une pratique en rapport avec le vin. C’est déguster des cuvées sur la terrasse d’un château, faire du vélo dans les vignes ou encore, dormir dans un gîte vigneron« , commence Marc Jonas. Guide-conférencier pendant 20 ans et spécialiste du tourisme viticole, Marc a assisté à l’émergence de l’œnotourisme en France. Alors que le marché international était déjà bien implanté – en Californie, en Afrique du Sud, en Toscane… – la France, elle, a pris du retard à l’allumage. Les vignerons ont mis du temps à accepter l’idée que l’œnotourisme puisse être une manière de vendre du vin, observe Marc Jonas. Des dégustations à la cave aux premières visites de chais, les initiatives œnotouristiques ont émergé d’abord timidement. Le Label Vignobles & Découvertes, créé par Atout France en 2009, a donné un élan au mouvement. « Dans cette dynamique, Bordeaux a toujours été la locomotive. L’Alsace, avec sa route des vins, la Champagne, la Vallée de la Loire puis la Région Auvergne-Rhône-Alpes et la Provence ont pris tour à tour le virage« , ajoute l’expert. Mais à ses yeux, le chemin à parcourir est encore long car l’offre est loin d’être homogène sur le territoire. « On a 13 régions viticoles en France, 13 cultures du vin et à peine 50% des vignerons qui proposent un accueil à la propriété« , constate-t-il. Et, selon lui, la crise sanitaire du COVID-19 sème la zizanie en rebattant les cartes… « Dans certaines régions, les chefs-lieux de l’œnotourisme sont désertés par leur clientèle étrangère habituelle. Et s’adresser à un public local nécessite de repenser toute l’offre. Car quand on fait de l’œnotourisme en France, il faut savoir toucher les gens, vendre une relation« , détaille-t-il. Peut-être ce chamboulement ouvre-t-il un horizon inespéré sur un œnotourisme plus responsable…
Dire qu’on possède un bâtiment à énergie positive, ce n’est pas suffisant« 

Au Château Kirwan pour l’ADT Gironde

« L’œnotourisme durable, c’est un peu plus qu’être un vigneron bio et avoir une chambre d’hôtes équipée de panneaux solaires. Dire qu’on a un bâtiment à énergie positive, ce n’est pas suffisant », note M. Jonas. Pour le spécialiste, le tourisme – pour qu’il puisse avoir un impact positif sur l’écologie – doit être durable sur toute la chaîne de consommation. Etre un « œnotouriste durable », c’est être le moins consommateur possible en gaz carbonique, le plus respectueux des écosystèmes, le moins perturbant pour les populations qui reçoivent… C’est voyager en ayant la conscience écologique de faire partie intégrante de l’environnement », ajoute-t-il. Du choix du mode de transport vers le vignoble (le train plutôt qu’un véhicule individuel), à celui pour rayonner sur place (le vélo) aux produits alimentaires consommés (issus de l’agriculture locale) et aux propriétés visitées… L’œnotourisme durable doit s’envisager à 360°. « Sans oublier notre rapport au digital… Si l’on voyage en passant son temps à surfer sur internet ou à relayer en direct notre quotidien, on fait aussi flamber notre bilan énergétique. Rappelons qu’un mail envoyé équivaut à 1h de consommation d’électricité« , souligne Marc.

Oenotourisme durable ou pédagogie écologique ?

Le Château Smith Haut Lafitte multiplie les initiatives écologiques

« Le vigneron a une responsabilité sociétale. En travaillant en bio, par exemple, en récupérant ses eaux de pluie, en favorisant la biodiversité il montre, il sensibilise l’œnotouriste qui est, rappelons-le, un consommateur« , explique l’expert. Il cite, en exemples, le Château Smith Haut Lafitte à Bordeaux qui, depuis 2012, est équipé d’un chai écologique semi-enterré et qui multiple les initiatives : station d’épuration, récupération des eaux, inertie thermique des locaux. Un système ingénieux lui permet également de capter le gaz carbonique libéré pendant les fermentations afin de le convertir en bicarbonate de soude. « Ce qui nous permet, entre autres usages, de l’utiliser pour réguler le PH des sols du potager bio. Nos légumes sont ensuite servis à la table du restaurant, explique le Château ». Un bel exemple d’économie circulaire au service de l’œnotourisme !
En Dordogne, les propriétaires du Château Feely – en biodynamie – s’engagent à venir chercher à la gare voisine les visiteurs qui viennent passer une journée au domaine pour les inciter à se déplacer de manière plus responsable.

Le Vignoble Klur a entamé sa décroissance joyeuse pour se consacrer à l’élaboration de vins plus responsables

En Alsace, le Vignoble Klur s’est quant à lui séparé de quelques hectares de vignes ces dernières années afin de pouvoir se consacrer pleinement à la production de vins au style naturel et à la création d’un éco-lieu avec des hébergements. « L’an prochain nous allons construire un nouveau chai en terre et paille. Nous aimerions que cela puisse être un chantier participatif associant nos clients, amis, tous ceux qui auraient envie de découvrir ou se former à d’autres techniques de construction« , explique Elisa Klur, la vigneronne. A Buzet, les vignerons de la coopérative ont créé, dans leur circuit de visite ouvert au public, « un Jardin des filtres » d’éco-épuration des eaux usées. En parallèlement, la coopérative est très impliquée dans l’égalité salariale hommes-femmes avec le label Egalité diversité. « Car l’œnotourisme durable doit aussi s’exprimer dans cet aspect sociétal. Il est transversal ! Il ne s’arrête pas à l’aspect « service » mais il fait bien partie d’un tout. Son objectif est de sensibiliser, de provoquer un élan collectif. Car nous n’avons plus d’autre choix que d’avancer vers une forme de tourisme plus vertueux », termine M. Jonas.

 Buzet, une belle initiative de jardin intelligent pour ouvrir le public à de nouvelles pratiques

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Œnotourisme durable : définition !

La planète est anxieuse … et depuis la crise du Covid 19 le sentiment de « Care » ou Prendre Soin a grandi … « On a pris 10 ans en 2 mois et demi » disent les médias !

Avec l’anthropocène, nous sommes entrés dans l’ère de la bienveillance sans être sorti de la dépendance à l’énergie carbonée.

Lorsque l’on cherche à croître, accepter le changement est de la plus haute importance

Le secteur touristique s’est déjà très engagé dans la voie du durable. Des départements comme le Gers ont entamé une démarche Slow depuis longtemps. Il invite les voyageurs à repenser leur usage des espaces. Ce tourisme différent propose un rythme propre à chaque voyageur, moins prédateur, moins industrialisé et plus inclusif.

De son côté, le secteur du vin, champion du bio dans le monde agricole s’est investit dans des pratiques culturales plus respectueuses. Entre HVE, Bio et Biodynamie, la gamme des adaptations possibles à une viticulture verte répond à de nombreux besoins en matière d’adaptation agricole.

Des appellations comme Faugères inscrivent dans leurs cahiers des charges la limitation du désherbage chimique et la fertilisation azotée. Cela a créé une vraie dynamique collective avec un taux de vignerons en bio. Ils sont quatre fois supérieur à la moyenne nationale.

Mais qu’est-ce que l’œnotourisme durable ?

En matière d’œnotourisme la réflexion se dessine doucement. Ce concept est loin encore d’être compris et partagé.

Imaginons un visiteur qui visite un domaine en biodynamie, qui dort dans un écolodge et mange dans un restaurant étoilé vert.

Pensez-vous qu’il est œnotouristiquement durable ?

Il le serait si son transport était vertueux (ce qui exclu d’emblée tous les utilisateurs d’avion pour des séjours courts). Si les dépenses occasionnées lors de ses excursions avaient des retombées principalement locales. Si sa consommation de services ne perturbait pas excessivement la vie des populations et des écosystèmes …

On le comprend il ne suffit pas d’avoir une ou deux composantes du programme touristique qui soient écoresponsables … Il faut que l’ensemble de la chaine de valeur de ce secteur soit le plus vertueux possible !

Cela prend en compte le spectre du parcours client, depuis les premières requêtes sur les moteurs de recherche jusqu’aux messages sur les réseaux sociaux pour partager les souvenirs de moments d’exception. Il faudrait évaluer l’impact énergétique, sociétal au même titre que celui économique de chaque action du visiteur.

Cela peut aussi se mesurer à l’aune des cinq principaux critères environnementaux  que sont :

  • La consommation d’eau
  • La consommation d’énergie
  • La quantité de déchets générés
  • L’émission de gaz à effet de serre
  • Le pourcentage de produits biologiques et écologiques utilisés

Un paradoxe au cœur de la Culture client

La clientèle œnotouristique est aisée et très consommatrice de gaz carbonique. Elle ne correspond pas automatiquement avec l’offre d’œnotourisme durable, sobre, responsable, solidaire.

L’amateur de vin est citadin, aisé et cultivé, hyper mobile et hyper connecté : un sybarite glouton.

Comme me le faisait remarquer James de Roany, le verre est une catastrophe écologique (les fours en fonctionnement 24h/24, son transport pondéreux génère beaucoup de Co2, son recyclage également). Sa société Green Gen Technologie projette de palier ce problème avec une bouteille faite en fibres végétales (lin, bambou, chanvre …) et participe également, même si cela est indirect, à rendre l’œnotourisme plus responsable.

Car il s’agit d’évaluer l’ensemble des acteurs qui peuvent entrer dans la composition d’un voyage œnotouristique : vers un transport moins polluant, bruyant ou encombrant ?

L’hébergement moins envahissant et dévastateur d’espaces non humanisés devrait être plus économe en énergie. La restauration moins gaspilleuse et plus engagée dans les circuits courts d’approvisionnement. La communication en générale, qui est fortement utilisatrice d’énergie (si le monde digital était un pays, il serait le troisième plus gros consommateur derrière les USA et la Chine)…

Mais comment orienter les visiteurs vers une consommation plus sobre ?

Le tourisme durable c’est le tourisme de l’engagement !

le visiteur doit savoir pourquoi il vient !

L’œnotourisme durable s’inscrit dans une mouvance globale. La sensibilité écoresponsable n’en est plus à ses balbutiements.

  • -Une plateforme de réservation comme vaovert.fr permet de réserver des hébergements respectueux de l’environnement. Sa créatrice Mélanie Mambré grâce à un algorithme est capable maintenant de mesurer et qualifier le niveau d’engagement d’un hébergement éco-responsable.
  • Caro Feely vigneronne Sud Africaine installée en Dordogne et ancienne consultante pour Accenture considère qu’il faut agir avec envie. Le désir et l’engament des acteurs œnotouristiques doivent prévaloir pour « parler aux gens, partager les valeurs et toucher les esprits ».
  • La coopératives de Tain l’Hermitage a passé le cap et a atteint la norme ISO 26000 : c’est-à-dire qu’elle a décidé d’intégrer une logique de «progrès permanent et participatif, respectueux de l’environnement, respectueux des agents, et des hommes et des femmes à l’extérieur, tout en assurant la pérennité économique » wikipedia
  • -Iso 2600 également, le domaine de la Jasse près de Montpellier, favorise le déplacement doux avec l’usage de VTT & de Méhari électriques. Ce domaine place au centre de sa vision managériale le capital humain et environnemental.

L’œnotourisme durable : une vision partagée

« 86% des Français pensent que « notre manière de consommer est nuisible à l’environnent »

Outre l’aspect sociétal, les enjeux sont d’ordres relationnels et communicationnels. En activant les circuits de la conscience écologique l’entreprise intervient en interne sur son cercle proche de collaborateurs et d’entreprises partenaires. C’est ce que fait blb-vignobles qui a « lancé un challenge auprès de l’ensemble de ses parties prenantes » pour collecter et recycler les bouchons :  #BouchonsNous est une démarche éco-citoyenne organisée avec la Fédération Française du Liège.

L’idée est de permettre à ces derniers de s’approprier les valeurs durables de l’entreprise œnotouristique, de les responsabiliser et de leur donner l’opportunité de propager à leur tour cet engagement comme le propose le plan stratégique de l’OIV

  • -L’éducation à la consommation (confère la consommation responsable de Vin & Société)
  • -La transmission de la connaissance de la réalité vitivinicole (valorisation du métier)
  • -Le respect du produit, pour les hommes et les femmes qui travaillent dans les champs
  • -Des conséquences du changement climatique
  • -De valoriser le lien avec la terre (Terroir : le concept d’une vie collective)
  • -D’induire compréhension et respect pour la production
  • -De la prise de conscience de la crise climatique et des changements comportementaux à tenir

Ce cercle vertueux peut s’élargir aux intermédiaires b2b (la chaîne de distribution et de fournisseurs) et surtout vers les visiteurs en quête de découverte, de sens et d’émotion.

Enfin, Le tourisme à un rôle essentiel dans l’économie locale. L’entreprise viticole vertueuse, peut fortement interagir avec la population locale en évangélisant et montrant l’exemple. Cela va de toute évidence vers un tourisme plus alternatif, plus slow, plus humain.

Au carrefour historique d’une économie post-moderne, l’œnotourisme durable pour l’industrie viticole est une manière de valoriser son niveau minimum de professionnalisme en proposant une offre immatérielle basée sur l’éthique sociétale et environnementale.

En créant des emplois sur sites, en générant des étapes plus longues, en aidant les échanges humains et la compréhension des modes de vie on suit la tendance d’une demande croissante basée sur le Mindfulness : la pleine conscience, l’attention, la vigilance ou être en accord avec ce que l’on est !

Plus qu’un frémissement, cela semble s’affirmer avec les prémices d’un déclin du tourisme industriel (Faillite de Thomas Cook, vacillement de TUI, arrêt de la production aéronautique …) dont les modèles économiques prédateurs risquent de ne pouvoir continuer s’ils n’incluent pas des propositions sociétales. Et c’est encore plus vrai si l’on conserve la valeur ajoutée sur le territoire !

L’œnotourisme durable : une réponse viable pour la génération Y

Le monde change : une part importante de l’opinion publique est de plus éco-sensible. Le marché du tourisme réagit déjà activement … Une tendance nouvelle le « staycation » pourrait se comprendre comme une des réponses possibles à l’angoisse climatique croissante.
Nous sommes entrés dans l’ère de l’éthique : fatalement les discours idéologiques reviennent … ou du moins ce qui essaient de donner du sens !
Fin de l’œnotourisme élitiste et intimidant

La génération Y, de 18 à 35 ans, les « millenials » représentent la première génération qui aura connu une révolution digitale, à la différence des générations précédentes. Ils constitueront bientôt 75% de la population active en Europe, ce sont donc eux qui auront le pouvoir financier et de consommation dans les vingt-cinq prochaines années.

emportez-vos-dechets

Militantisme autochtone dans la région du Salagou dans l’Hérault

Cette génération est la plus grosse consommatrice de tourisme : les millenials représentent déjà 40% du marché du tourisme en Europe et 50% du marché mondial du tourisme de luxe. Ils sont donc plus attachés à vivre des expériences de tourisme uniques, authentiques que de posséder des biens, à l’inverse de la génération de leurs parents et de leurs grands-parents.

Cette génération s’inscrit dans l’immédiateté, l’universalisme des possibles, la fluidité, le partage et les recommandations (Etude Atout France : Image et attractivité internationales de la France pour les 18-35 ans, 2019).

Est-ce que l’œnotourisme à la française, proposant une visite souvent élitiste des caves suivie d’une dégustation correspond-t-il encore aux attentes des « digital natives » ? Est-ce l’œnotourisme durable sera capable de répondre à leurs besoins dans les années à venir ?

1 – La quête de sens & vivre le moment présent :

Les millenials et le tourisme

Il faut tout d’abord étudier les valeurs des millenials pour voir comment celles-ci se répercutent sur leur comportement d’achat, et notamment sur leur consommation en matière de tourisme.

La liberté et l’indépendance sont essentielles pour cette génération. Ils souhaitent s’affranchir des règles, des habitudes et de la routine. Ils vivent au jour le jour sans penser au lendemain et souhaitent vivre pleinement le moment présent.

D’autre part, cette génération a une soif de découvertes, de rencontres et d’expériences inédites, avec un réel désir de vivre l’exception. La philosophie « YOLO », « you only live once » correspond très bien à leurs intérêts.

L’authenticité est également un critère fondamental chez eux. Le voyage doit être un moyen d’étonnement, de découverte de l’âme d’un pays. Ils privilégient donc les moments de rencontres et de partages avec les locaux. Ils sont aussi très friands de ce qui est unique, typique de la destination. Ils choisissent en priorité des pays qui sont très différents des leurs et sont prêts à débourser un budget substantiel pour réaliser leur rêve.

locavore

Leur développement personnel ainsi que la notion d’éthique sont également très importants pour eux.

Exit le voyage organisé, de masse. Les destinations connues sont toujours prisées, mais ils changent leur propre mise en scène de leur rêve. Ils entrent en interaction sur leur terrain de jeu favori (la destination) comme sur leur plateforme de gaming : ils auto-personnalisent leur voyage et en deviennent le héro.

Ils fuient l’artificiel. Le voyage doit être pour eux, individuel et flexible, et se construit à partir de AirBnB, Expedia, Skyscanner, Booking.com et Kayak.

Lors de leur séjour, ils restent hyper-connectés à leur famille et à leurs amis, leurs collègues par l’intermédiaire de plateformes telles que Facebook, Instagram, Whatsapp. Arrivés à destination, ils vont continuer à surfer sur le net pour organiser des éléments de leur séjour, comme réserver un restaurant, une activité sportive ou culturelle, une visite de domaine viticole.

Les réseaux sociaux influent beaucoup sur la façon dont les milléniaux perçoivent le monde et la manière dont ils se perçoivent eux-mêmes. Avoir un lieu de visite « instagrammable » est très important pour eux. De plus, de retour dans leur pays, ils resteront connectés aux amis qu’ils se sont faits aux quatre coins du monde.

Les millenials et le vin

L’étude IFOP/Vin et Société réalisée en 2016, décrypte les relations entre les millénials français et le vin. 7 français sur 10 (de 18 à 30 ans) déclarent boire du vin.  Cette enquête montre que seulement 34% de cette génération s’intéresse au vin, parmi eux, 28% pour les 18-20 ans à 39% pour les 25-30 ans. On observe cette tendance dans tous les pays occidentaux. La pratique du vin augmente avec l’âge.

Elle est très influencée par la transmission et le mimétisme : ceux qui s’intéressent au vin ont été initiés à cette boisson par leur famille et leurs proches. (63% des jeunes pensent d’ailleurs que le vin s’apprend en famille et 40% d’eux se tournent vers leur famille pour parfaire leurs connaissances en vin.)

Autre élément important de cette étude, les jeunes consomment le vin traditionnellement lors des repas.

Par contre, ils sont très friands de discours authentique et de storytelling. Ils souhaitent également de l’incarnation, les grands châteaux étant pour eux, un endroit « mystérieux », élitiste qui ne leur donnent pas forcément envie. Ils souhaitent plutôt comprendre la vie du vigneron.

Ils voudraient également connaître la philosophie d’un domaine et pouvoir se l’approprier. Expliquer la raison pour laquelle ils ont choisi ce vin en l’offrant à leurs amis est très important pour eux. Ils souhaitent tout savoir sur l’élaboration du vin mais en même temps, s’attendent à un côté magique. Il faut donc adopter une posture « d’enchanteur » afin de leur proposer une histoire enchanteresse. Finalement, ne pas oublier que cette génération de « digital natives » est portée par les images, la culture graphique. Ils s’intéressent particulièrement aux bouteilles «  designées » et aux étiquettes audacieuses à l’exemple des vins naturels.

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Intitulé de table ronde sur le « Vin Durable » à l’ISVV Bordeaux

Les millénials et l’œnotourisme  

Une étude réalisée en Australie et en Nouvelle-Zélande en 2011 a étudié leurs attentes en matière d’œnotourisme. Elle a révélé les éléments phares suivants. Tout d’abord, cette génération valorise l’expérience au caveau bien plus que la dégustation et l’achat de vins.

Cette expérience se doit d’être ludique, détendue, et surtout pas intimidante. On se rend au domaine pour passer un agréable moment de détente, en groupes, entre collègues ou amis. La génération X a une vision plus académique de l’œnotourisme : l’aspect dégustation et la connaissance du vin est leur principal point d’intérêt.

La génération Y attache une importance élevée au décor et à l’atmosphère.  Sensibles à une belle architecture, l’aspect froid et conventionnel les rebutera. Logiquement, ils apprécient particulièrement une mise en scène où les hôtes les mettent à l’aise de façon détendue et informelle, avec des visites personnalisées ou engageantes. Pour les intéresser, il faut leur proposer une découverte ludique du patrimoine, de l’histoire, de la dégustation…

Comme observé dans la première partie, ils désirent des expériences originales qu’ils pourront relayer sur les réseaux sociaux.

2 – Le consommateur paradoxal : éco-citoyen et impatient !

« 75% des clients souhaitent que la future destination de leurs vacances ne soit pas un lieu de surtourisme » selon Raffour.

Les touristes désirent l’impossible, comme avoir une bonne place proche de la mer début août, pour bronzer sans être entassés. Du côté œnotourisme, le visiteur désire être attendu et en même temps avoir la liberté de ne pas réserver.

C’est le modèle de Camaïeu ou de Zara qui laisse le client entrer dix fois sans acheter, revenir et consommer, puis revenir une nouvelle fois pour échanger son achat. Le client est flatté dans ses caprices, car on lui propose sans cesse, un service de plus en plus flexible. L’œnotouriste aimerait pouvoir se comporter de la sorte dans la cave.

D’où toute la difficulté en France, pays du Terroir, de standardiser l’unique, de mettre en marché de l’intime et de l’authentique. La schizophrénie du client impose la prise en charge d’une offre toujours plus personnalisée. En revanche, cela donne également l’opportunité de valoriser l’offre essentiellement par la rencontre, le présentiel. C’est la valeur ajoutée de la mise en tourisme du terroir.

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L’éco-citoyenneté

L’éco-sensibilité progresse tous les jours … Nous sommes en permanence alertés par les accidents climatiques, les phénomènes nouveaux qui perturbent un idéal de consommation.  Le succès du bio s’explique par l’appropriation des valeurs symboliques du produit et suppose des pratiques vertueuses de celui qui l’achète.

Ainsi sur les 12 critères du Baromètre Raffour Interactif qui déterminent le choix d’une destination, le respect de l’environnement a fortement progressé. (-1 la sécurité : 91%, -2 le sur-tourisme : 75%, -3 les aléas climatiques : 42%, -4 le respect de l’environnement sur place : 41%, -5 les droits de l’homme : 22% et -6, le trajet pour s’y rendre : 9%).

Le 21ème siècle est né avec la notion d’éthique de vie ancrée dans les esprits ! Tous les secteurs de l’économie (l’industrie du textile et le mouvement de boycott du black Friday par exemple) sont concernés. La question du durable est désormais au cœur des préoccupations du voyageur. L’œnotourisme n’échappe pas à cette prise de conscience.

Nous sommes devenus des éco-citoyens qui consommons du tourisme : cela implique la compréhension des droits et des devoirs vis-à-vis d’un territoire ! Ce concept qui est devenu une réalité, dirige maintenant nos pas d’œnophiles aventuriers.

Les digital natives sont aussi les premiers à être victimes d’éco-anxiété et cela à l’échelon global. L’éco-sensibilité va marquer de plus en plus les comportements des consommateurs qui désirent s’exprimer au travers d’actions proposées par les metteurs en marchés.

Le business du bonheur et l’UX (User Experience) 

Objet culturel par excellence avec les paysages et les terroirs, l’œnotourisme doit se mettre en scène pour accueillir des œno-curieux plus que d’authentiques connaisseurs.

Les jeunes touristes ont besoin de clés d’accès et de moyens d’interprétation. Les goûts, les significations qui faisaient encore sens, il y a quelques décennies, doivent être maintenant éclairés.

  • L’un des effets de l’économie digitale est l’accélération de la rupture ville / campagne. Bien que le vin devienne un prétexte pour aborder les espaces ruraux, ces derniers paraissent inquiétants car supposés vides, le visiteur a besoin d’une médiation.

  • Une autre de ces conséquences est la place prise par l’image : l’aspect facile de l’usage du smartphone combiné à la ludification de l’économie.

Les services proposés, physiques, digitaux et multi-sensoriels doivent maintenant être conçus à l’aune de l’expérience client. Il s’agit de piloter les sentiments et les émotions des clients, au bénéfice de l’entreprise.

Rodolphe Christin, dans son Manuel de l’anti-tourisme, relativise les succès de l’industrie touristique et mesure son impact sur le bon état de la planète. Il précise que « si le voyage est philosophie, le tourisme est économie…le premier explore, le deuxième exploite ». En partant de ce point de vue et en admettant une nécessaire adaptation aux contraintes écologiques, une réflexion collective ainsi qu’individuelle (le professionnel et le voyageur) s’impose.

Le RSE – Responsabilité Sociétale des Entreprises

L’évolution du marché vers du plus propre, du plus vrai, du plus économique pour la planète va devenir une véritable Ressource Sensible et Economique pour les entreprises !

A niveau de service et qualité égaux, le consommateur choisira l’offre qui saura le séduire et surtout le rassurer dans sa démarche écologique.

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Domaine Cabasse – AOP Séguret

Le durable pour un vigneron va bien au-delà de la limitation de l’usage d’intrans, du labour au cheval ou l’installation d’hôtels à insectes. Le « green washing » existe également dans l’offre œnotouristique ! Le durable va au-delà de la production agricole : elle se situe dans la relation avec son personnel, les interactions avec la population locale, les prestataires, les administrations …. Les Vignerons de Buzet constituent un bel exemple de volontarisme tant agricole, humain que sociétal.

C’est ainsi que l’on peut penser à une définition d’un œnotourisme plus respectueux et plus sobre pour notre planète sans plan B.

3-L’Œnotourisme Durable

Comment devons-nous parler de l’œnotourisme durable ? Doit-il être Responsable ? Equitable ? Solidaire ?

La RSE, le HVE (Haute Valeur Environnementale), les labels bio ne sont que des symptômes d’une préoccupation globale. Le monde viticole, champion de l’agriculture bio, montre la voie.

Les enjeux futurs de l’œnotourisme seront déterminés par les stratégies agro-écologiques. L’offre œnotouristique, qui est déjà en phase concurrentielle, devra intégrer un discours sincère qui garantira aux winelovers des pratiques respectueuses de l’environnement : l’idée de fond est de ne pas piller les ressources et de garantir aux générations futures leur accès !

La production touristique, très complexe à appréhender car faite d’une multitude d’acteurs interdépendants, doit se transformer en écosystème plus vertueux.

Les métiers du tourisme devront imiter leurs collègues du monde viticole et suivre les préceptes HVE, en proposant des garanties environnementales pour les populations autochtones tout en utilisant des transports écologiques, des hébergements à énergie positive…

– Déjà quelques agences de voyages se sont lancées dans cette niche, à l’instar de « Double Sens » dirigée par Aurélien Seux & Antoine Richard.

– « Elexi », ce transporteur VTC dans le Bordelais utilise des véhicules électriques et offre un circuit viticole qui ne s’arrête que chez des vignerons bio, comme Château la Dauphine à Fronsac.  Dans cette logique, le jeune patron Alexandre Aubertin s’attache à tenir aussi une politique salariale responsable.

– Dans le digital, « explorama » dont le créateur est diplômé en biologie, donne les moyens aux acteurs et en particulier aux vignerons de valoriser leurs contenus écologiques et vertueux en les aidant à se mettre en scène.

– Jérôme Maillot, vigneron du domaine des Temps des Rêveurs en Provence, a pris le parti du collectif et participatif. Vigneron naturel dans les vignes, il l’est également dans son approche relationnelle et commerciale. Il fait régulièrement appel à des woofers qui viennent travailler en échange du gîte et du couvert : un échange basé sur la rencontre, l’apprentissage, le travail en commun et le partage d’expériences.

Rappelons, cependant, que digitalisation n’est pas synonyme de vertu écologique ! Des serveurs comme OVH ou Infomaniak sont capables de proposer une électricité basée sur une énergie renouvelable, mais celle-ci à un coût qu’il faut pouvoir valoriser.

Cette question de l’œnotourisme durable va de pair avec la tendance à la consommation des Terroirs qui se base sur une immersion complète en répondant à une quête d’authenticité intransigeante. Ce modèle doit trouver son format, mais il est significatif d’une évolution possible d’un marché qui sera de plus en plus regardant sur les mises en scène factices et des effets recherchés à outrance (l’effet WAOUH). L’une des caractéristiques de la digitalisation du tourisme est la massification de la personnalisation, qui correspond totalement aux attentes de la génération Y.

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Recevoir toujours plus sans casser la poule aux œufs d’or :

La gestion réussie d’une offre œnotouristique durable ne réside pas uniquement dans sa fonction agricole. La dimension humaine est au moins aussi importante !

Dans notre domaine, l’inquiétude des populations locales au sujet du sur-tourisme – thématique très sensible – reflète bien une réalité des vignobles de cette région. Certains terroirs bordelais frisent la saturation.

Pour reprendre le mot de Rodolphe Christin*, le « simulacre » met en danger l’accueil authentique. Cette hospitalité, à la limite du factice, est basée sur une idée de performance,  du sur-joué, nécessaire pour la mise en place de l’UX. Le risque est de dénaturer l’essence de la relation au vin, au pays visité, à la relation humaine.

  • Comment faire pour répondre « industriellement » et massivement à une recherche de spontanéité, de typicité et de vérité ?

  • Comment mettre en scène un terroir (le goût du local) au diapason d’une demande au goût standardisé qui a été nourrie au Red Bull ou au Coca-Cola ?

Nous retrouvons toute l’ambiguïté des injonctions paradoxales d’un marché contradictoire en quête d’opposés !

Faut-il aller vers une charte de l’œnotourisme durable ?

Que signifie l’adjectif « durable » quand il est accolé à œnotourisme ?

A coup sûr, les notions de pureté du vin et de sa démarche de production, du respect de certaines traditions et d’un ancrage légitime dans le territoire, d’un discours sincère et d’une relation client authentique, de valeurs en phase avec des objectifs responsables et sociétaux … la liste n’est exhaustive mais permet d’appréhender le spectre du concept.

  • Cette vision durable s’entrevoie dans une dimension plus douce de la consommation. Le consommateur durable s’exprime au travers d’achats signifiants, dans une pratique engagée, en visitant vignobles et terroir en cohérence avec qui l’on est et ce que l’on pense. Durable raisonne avec slow tourisme.
  • Se déplacer prends alors un sens nouveau et revient dans le corps de l’expérience. L’acte de voyager signifiant construire, plutôt que consommer passivement, comme un touriste acheteur d’un contenu froidement fonctionnel : une pérégrination autorisant une certaine dimension d’incertitude, une idée de proximité et d’itinérance primant sur la promesse d’un plaisir packagé. Le durable serait-il synonyme de voyageur ?
  • Le comment voyager est la question centrale. La mobilité quasi synonyme de voiture suggère alors une économie de gaz carbonique consommé. La solution reviendrait à combiner le train et un service VTC ou un transport en commun. C’est aussi l’usage de véhicules électriques ou plus encore, partir à deux roues en suivant des offres qu’un « My Trip Tailor » propose avec un déplacement à la carte, géolocalisé et personnalisable.
De l’éco-sensibilité à l’œnotourisme durable
L’évolution globale de la demande vers un comportement plus responsable, écologique, sobre et bienveillant avec les modes de vie locaux, évolue parallèlement avec l’émergence d’un sentiment collectif particulièrement sensible pour la Génération Y.
Cette dernière, branchée digital, est née avec de nouveaux concept tels que l’écocitoyenneté, l’anthropocène, le fly-shaming. Elle est gourmande d’éthique et de spiritualité, exigeante en partage et en expérience.
Les modalités de découverte dans un futur proche convergeront sûrement en une approche des espaces ruraux, symboles d’une arcadie mythique, où les valeurs d’une nouvelle convivialité seront toujours pratiquées autour d’un vin de plus en plus méconnu.
Arbre de vie et arbre de connaissance, ce lien culturel fort fera encore sens, pour peu qu’un effort de mise en scène sincère reliant l’humain à la terre, le business au sociétal soit mis en place. Dans cette vision, l’œnotourisme durable peut être vu comme une chance nouvelle pour redynamiser un modèle économique et réinterpréter une pratique hédonique bimillénaire.
…« Aux arbres citoyens ! » (Régis Debray)

Rodolphe Christin* : Le Manuel de l’Anti-Tourisme – Editions Ecocsociété

J’ai écrit cet article en collaboration de Laurence Cogan, Professeur d’œnotourisme chez School of Wine & Spirits Business de Dijon qui a été en charge de la première partie. Marc Jonas