La planète est anxieuse … et depuis la crise du Covid 19 le sentiment de « Care » ou Prendre Soin a grandi … « On a pris 10 ans en 2 mois et demi » disent les médias !
Avec l’anthropocène, nous sommes entrés dans l’ère de la bienveillance sans être sorti de la dépendance à l’énergie carbonée.

Le secteur touristique s’est déjà très engagé dans la voie du durable. Des départements comme le Gers ont entamé une démarche Slow depuis longtemps. Il invite les voyageurs à repenser leur usage des espaces. Ce tourisme différent propose un rythme propre à chaque voyageur, moins prédateur, moins industrialisé et plus inclusif.
De son côté, le secteur du vin, champion du bio dans le monde agricole s’est investit dans des pratiques culturales plus respectueuses. Entre HVE, Bio et Biodynamie, la gamme des adaptations possibles à une viticulture verte répond à de nombreux besoins en matière d’adaptation agricole.
Des appellations comme Faugères inscrivent dans leurs cahiers des charges la limitation du désherbage chimique et la fertilisation azotée. Cela a créé une vraie dynamique collective avec un taux de vignerons en bio. Ils sont quatre fois supérieur à la moyenne nationale.
Mais qu’est-ce que l’œnotourisme durable ?
En matière d’œnotourisme la réflexion se dessine doucement. Ce concept est loin encore d’être compris et partagé.
Imaginons un visiteur qui visite un domaine en biodynamie, qui dort dans un écolodge et mange dans un restaurant étoilé vert.
Pensez-vous qu’il est œnotouristiquement durable ?

Il le serait si son transport était vertueux (ce qui exclu d’emblée tous les utilisateurs d’avion pour des séjours courts). Si les dépenses occasionnées lors de ses excursions avaient des retombées principalement locales. Si sa consommation de services ne perturbait pas excessivement la vie des populations et des écosystèmes …
On le comprend il ne suffit pas d’avoir une ou deux composantes du programme touristique qui soient écoresponsables … Il faut que l’ensemble de la chaine de valeur de ce secteur soit le plus vertueux possible !
Cela prend en compte le spectre du parcours client, depuis les premières requêtes sur les moteurs de recherche jusqu’aux messages sur les réseaux sociaux pour partager les souvenirs de moments d’exception. Il faudrait évaluer l’impact énergétique, sociétal au même titre que celui économique de chaque action du visiteur.
Cela peut aussi se mesurer à l’aune des cinq principaux critères environnementaux que sont :
- La consommation d’eau
- La consommation d’énergie
- La quantité de déchets générés
- L’émission de gaz à effet de serre
- Le pourcentage de produits biologiques et écologiques utilisés
Un paradoxe au cœur de la Culture client
La clientèle œnotouristique est aisée et très consommatrice de gaz carbonique. Elle ne correspond pas automatiquement avec l’offre d’œnotourisme durable, sobre, responsable, solidaire.
L’amateur de vin est citadin, aisé et cultivé, hyper mobile et hyper connecté : un sybarite glouton.
Comme me le faisait remarquer James de Roany, le verre est une catastrophe écologique (les fours en fonctionnement 24h/24, son transport pondéreux génère beaucoup de Co2, son recyclage également). Sa société Green Gen Technologie projette de palier ce problème avec une bouteille faite en fibres végétales (lin, bambou, chanvre …) et participe également, même si cela est indirect, à rendre l’œnotourisme plus responsable.

Car il s’agit d’évaluer l’ensemble des acteurs qui peuvent entrer dans la composition d’un voyage œnotouristique : vers un transport moins polluant, bruyant ou encombrant ?
L’hébergement moins envahissant et dévastateur d’espaces non humanisés devrait être plus économe en énergie. La restauration moins gaspilleuse et plus engagée dans les circuits courts d’approvisionnement. La communication en générale, qui est fortement utilisatrice d’énergie (si le monde digital était un pays, il serait le troisième plus gros consommateur derrière les USA et la Chine)…
Mais comment orienter les visiteurs vers une consommation plus sobre ?
Le tourisme durable c’est le tourisme de l’engagement !
le visiteur doit savoir pourquoi il vient !
L’œnotourisme durable s’inscrit dans une mouvance globale. La sensibilité écoresponsable n’en est plus à ses balbutiements.

- -Une plateforme de réservation comme vaovert.fr permet de réserver des hébergements respectueux de l’environnement. Sa créatrice Mélanie Mambré grâce à un algorithme est capable maintenant de mesurer et qualifier le niveau d’engagement d’un hébergement éco-responsable.
- –Caro Feely vigneronne Sud Africaine installée en Dordogne et ancienne consultante pour Accenture considère qu’il faut agir avec envie. Le désir et l’engament des acteurs œnotouristiques doivent prévaloir pour « parler aux gens, partager les valeurs et toucher les esprits ».
- –La coopératives de Tain l’Hermitage a passé le cap et a atteint la norme ISO 26000 : c’est-à-dire qu’elle a décidé d’intégrer une logique de «progrès permanent et participatif, respectueux de l’environnement, respectueux des agents, et des hommes et des femmes à l’extérieur, tout en assurant la pérennité économique » wikipedia
- -Iso 2600 également, le domaine de la Jasse près de Montpellier, favorise le déplacement doux avec l’usage de VTT & de Méhari électriques. Ce domaine place au centre de sa vision managériale le capital humain et environnemental.
L’œnotourisme durable : une vision partagée
« 86% des Français pensent que « notre manière de consommer est nuisible à l’environnent »
Outre l’aspect sociétal, les enjeux sont d’ordres relationnels et communicationnels. En activant les circuits de la conscience écologique l’entreprise intervient en interne sur son cercle proche de collaborateurs et d’entreprises partenaires. C’est ce que fait blb-vignobles qui a « lancé un challenge auprès de l’ensemble de ses parties prenantes » pour collecter et recycler les bouchons : #BouchonsNous est une démarche éco-citoyenne organisée avec la Fédération Française du Liège.
L’idée est de permettre à ces derniers de s’approprier les valeurs durables de l’entreprise œnotouristique, de les responsabiliser et de leur donner l’opportunité de propager à leur tour cet engagement comme le propose le plan stratégique de l’OIV
- -L’éducation à la consommation (confère la consommation responsable de Vin & Société)
- -La transmission de la connaissance de la réalité vitivinicole (valorisation du métier)
- -Le respect du produit, pour les hommes et les femmes qui travaillent dans les champs
- -Des conséquences du changement climatique
- -De valoriser le lien avec la terre (Terroir : le concept d’une vie collective)
- -D’induire compréhension et respect pour la production
- -De la prise de conscience de la crise climatique et des changements comportementaux à tenir
Ce cercle vertueux peut s’élargir aux intermédiaires b2b (la chaîne de distribution et de fournisseurs) et surtout vers les visiteurs en quête de découverte, de sens et d’émotion.

Enfin, Le tourisme à un rôle essentiel dans l’économie locale. L’entreprise viticole vertueuse, peut fortement interagir avec la population locale en évangélisant et montrant l’exemple. Cela va de toute évidence vers un tourisme plus alternatif, plus slow, plus humain.
Au carrefour historique d’une économie post-moderne, l’œnotourisme durable pour l’industrie viticole est une manière de valoriser son niveau minimum de professionnalisme en proposant une offre immatérielle basée sur l’éthique sociétale et environnementale.
En créant des emplois sur sites, en générant des étapes plus longues, en aidant les échanges humains et la compréhension des modes de vie on suit la tendance d’une demande croissante basée sur le Mindfulness : la pleine conscience, l’attention, la vigilance ou être en accord avec ce que l’on est !
Plus qu’un frémissement, cela semble s’affirmer avec les prémices d’un déclin du tourisme industriel (Faillite de Thomas Cook, vacillement de TUI, arrêt de la production aéronautique …) dont les modèles économiques prédateurs risquent de ne pouvoir continuer s’ils n’incluent pas des propositions sociétales. Et c’est encore plus vrai si l’on conserve la valeur ajoutée sur le territoire !